Conduire sans permis en toute légalité : le projet se confirme !
Permettre à un apprenti conducteur de prendre seul le volant sur autorisation de l’auto-école. Ce projet annoncé le 12 juillet dernier par Gérald Darmanin semblait enterré. Et pourtant, la mesure est bel et bien sur les rails. Nos dernières infos exclusives.
Permettre à de jeunes conducteurs qui n'ont pas encore le permis de prendre le volant d'une « vraie » voiture est à l'étude.
Cédric Lecocq
Pour une surprise, c’en fut une. À la veille des grands départs de l’été dernier, Gérald Darmanin annonçait dans une interview au quotidien régional Le Progrès l’idée d’une mesure choc pour réduire le délai d’attente à l’examen pratique du permis de conduire. « Le retard s’est accumulé à cause notamment du Covid », expliquait le ministre de l’Intérieur. Outre le recrutement de 100 inspecteurs supplémentaires, « je propose de lancer une réflexion sur la mise en place d’un permis probatoire sur le modèle du permis belge ».
De quoi s’agit-il ? Le principe est d’accorder à un apprenti conducteur l’autorisation de prendre seul le volant d’une voiture bien avant de passer l’examen, sur décision de son moniteur et à certaines conditions. En quelque sorte une variante de l’AAC (apprentissage anticipé à la conduite) actuel… mais sans accompagnateur ! Le ministre citait l’exemple d’une autorisation limitée à la conduite « en semaine, en journée et pas le week-end, si on a prouvé avoir un niveau de maîtrise de la conduite suffisant ». Et de conclure : « C’est une réflexion qui devra encore être discutée et approfondie avant de décider de son éventuelle mise en œuvre. »
Réaction hostile des inspecteurs
Mais depuis, à vrai dire, silence radio. Si ce n’est une grève des inspecteurs du permis lancée le 3 octobre à l’initiative du syndicat Snica-FO, à la fois pour dénoncer la fraude de plus en plus massive aux examens théoriques (comprenez, depuis que cette épreuve a été privatisée) et pour contester ce projet de permis « provisoire ». Selon eux, il s'agit d'une potentielle nouvelle source de fraude, d’insécurité routière et surtout d'une mesure qui ne réglera en rien le manque d’effectifs ni les délais d’attente, pouvant atteindre six mois.
30 heures de cours
Et pourtant, selon nos informations recueillies auprès d’acteurs des différentes filières concernées, les discussions autour de ce projet sont bien engagées. En voici les grandes lignes à ce jour :
- La mesure se limitera au permis B et sera réservée aux seuls candidats justifiant d’un contrat de travail.
- Autres conditions : avoir suivi 30 heures de formation en auto-école (contre 20 heures au minimum avec la filière de formation classique) et subi un « test des connaissances des risques ».
- L’élève se verra alors remettre une attestation délivrée par l'État, d’une durée limitée qui reste à définir (6 mois ?).
- Contrairement à la conduite accompagnée AAC, les horaires de conduite autorisée se limiteront à la journée en semaine.
- Il pourra toutefois y avoir exception si l’élève travaille le soir et/ou le week-end.
- Il est question de doter l’attestation d’un capital de 3 points. Aussi, en cas d’infraction grave telle un feu ou un stop grillé, plus d’attestation.
- Pour éviter la fraude serait créé un fichier consultable en direct par les policiers et gendarmes de terrain.
Pas avant 2024 ?
Voilà où en sont les discussions en ce mois de février 2023. Mais le projet n’est pas encore complètement arrêté, et il subira probablement des modifications au gré des réunions avec les différentes parties prenantes (et selon leurs humeurs). Quant au déploiement de ce permis provisoire, il pourrait se faire progressivement, région par région, à partir de 2024. Si le projet est intéressant en soi, notamment pour permettre aux jeunes d’accumuler de l’expérience au volant sans se ruiner et d’avoir bien plus de chances de décrocher leur carte rose du premier coup, ce n’est donc pas cette mesure qui permettra de réduire les délais d’attente à court terme.