Contrôle technique moto. Le conseil d'État l'impose dès octobre 2022
Une ordonnance du Conseil d’État rend obligatoire le contrôle technique des motos, scooters, quadricycles à moteur et consorts à compter du 1er octobre 2022. Cette décision annule le report puis la suspension qui avaient été décidés à l’été 2021.
Le contrôle technique doit devenir obligatoire pour les motos le 1er octobre 2022.
Harley-Davidson
Nouveau rebondissement concernant le contrôle technique moto, ou plus précisément celui des véhicules motorisés à deux, trois ou quatre roues tels que les scooters, motos, quads et autres voitures sans permis, thermiques comme électriques. Saisi par les associations Respire, Ras-le-Scoot et Paris Sans Voiture, le Conseil d’État vient de rendre caduque la suspension de l’entrée en vigueur de ce contrôle périodique obligatoire, annoncée par le Gouvernement durant l’été 2021. Les utilisateurs de ces véhicules devront soumettre leurs montures à inspection à compter du 1er octobre 2022 suivant un calendrier progressif lié à la date de première mise en circulation de celles-ci.
Une loi adoptée mais reportée, puis suspendue, et maintenant avancée
Une directive européenne datant de 2014 imposait un contrôle technique obligatoire desdits véhicules à compter du 1er janvier 2022. Le 11 août 2021, un décret français faisait entrer cette obligation dans la loi tout en la reportant au 1er janvier 2023. Au passage, la France intégrait les deux-roues motorisés de moins de 125 cm³ (plus de 6 km/h) ainsi que les quadricycles légers (catégorie L6e) dans la liste de ceux soumis au contrôle, allant plus loin que le texte européen qui concernait les catégories supérieures (deux-roues à partir de 125 cm³ ou équivalent électrique et quadricycles lourds). Mais dès le 12 août 2021, le Président Emmanuel Macron annonçait la suspension de ce décret au profit de mesures alternatives de sécurité routière qui seraient présentées à la Commission européenne comme le permet le droit européen.
Or, le Conseil d’État relève que « ni l’instruction écrite ni les échanges au cours de l’audience n’ont permis de préciser le contenu exact des mesures envisagées » et que « quel que soit le contenu des mesures notifiées, elles n’ont pas été mises en œuvre ». Il souligne également que le Gouvernement « n’a pas modifié le décret, qui reste donc le dernier état du droit dont le juge des référés était saisi » et reste ainsi en vigueur malgré les déclarations présidentielles. Mais, constatant une « méconnaissance » de la directive européenne, l’institution déclare « qu’il existe un doute sérieux quant à la légalité du décret fixant l’entrée en vigueur du contrôle technique pour les “deux-roues” à partir du 1er janvier 2023 et le suspend en tant qu’il reporte cette obligation au-delà du 1er octobre 2022 ». Autrement dit, selon l'avocat Maître Gatien-Hugo Riposseau, seule la date et seuls les véhicules cités dans la directive européenne sont concernés par la décision du Conseil d'Etat.
Concrètement, les deux-roues de plus de 125 cm3 et quadricycles lourds seront soumis au contrôle technique obligatoire à compter du 1er octobre 2022 ; les deux-roues de moindre cylindrée et quadricycles légers le seront à compter du 1er janvier 2023. Mais le Gouvernement pourrait bientôt réagir avec un nouveau décret pour entériner le rejet affiché du contrôle technique des motos par l'Elysée. Encore faut-il que les nouveaux ministres soient nommés.
La sécurité des motards comme argument principal
Pour leur saisine, les associations se sont appuyées sur un rapport d’experts remis au CNSR (Comité National de la Sécurité Routière) en 2020, qui met notamment en exergue la proportion des utilisateurs de deux-roues motorisés dans la mortalité routière. Ceux-ci représentent près de 25 % des tués sur la route alors qu’ils ne comptent que pour environ 2 % des usagers. Leur risque de mourir en circulation est 22 fois supérieur à celui des conducteurs de voitures et autres utilitaires légers, contre 16 fois en Allemagne et 17 fois en Espagne, des pays où le contrôle technique des motos est obligatoire.
Toutefois, le rapport en question ne fait nulle mention de la part des défaillances techniques des deux-roues dans leurs accidents, soulignant même l’immense prépondérance des comportements humains (manque d’attention des automobilistes, vitesse inadaptée des motards…). Il préconise diverses mesures telles que des contrôles de vitesse plus adaptés aux deux-roues, l’élaboration d’une signature visuelle mieux identifiable pour ces véhicules, ou encore la possibilité pour les assureurs de proposer aux motards des réductions de primes en échange d’un contrôle continu de leur « bon comportement » sur la route grâce à des mouchards.
Les fédérations de motards vent debout
Le Conseil d’État reprend à son compte certaines motivation des associations, comme par exemple « l’obligation de contrôle technique qui permettrait par ailleurs de réduire les nuisances sonores causées notamment par le débridage des moteurs, mais également celles liées à la pollution de l’air ». La FFMC (Fédération Française des Motards en Colère) est vent debout contre l’instauration du contrôle technique moto. « Ceux qui savent faire plus de bruit que la normale vont remettre leur machine en conformité le temps du CT, et repartiront aussitôt dans leur garage la remettre dans l’état bruyant qu’ils souhaitent », projette son délégué général Didier Renoux tout en dénonçant cette pratique. Reste également à savoir si les centres de contrôle technique parviendront à recruter le personnel, acquérir le matériel et obtenir les agréments nécessaires en cinq petits mois dont ceux des vacances estivales. De son côté la section parisienne de la FFMC PPC (Paris Petite Couronne) assure qu'un « nouveau décret » élaboré « avec le Ministère des Transports avant les élections, et qui annule le contrôle technique, est prêt ». « Il n'est pas encore sorti et est toujours d'actualité ! On attend que la ou le prochain Ministre des Transports soit nommé pour le promulguer ». Affaire à suivre, donc.
Comme pour les voitures, le contrôle technique sera obligatoire dans les six mois à compter du 4ème anniversaire de la première mise en circulation du véhicule, puis tous les deux ans. Gare à l'embouteillage pour les motos mises en circulation avant 2016, qui devront passer leur contrôle dès la première année de son obligation.