Essai Devalliet Mugello 375F. Le roadster néo-rétro made in France
Les amateurs de roadsters purs et durs de type Caterham risquent bien de s'intéresser de près à la Devalliet Mugello. Une machine légère au caractère rétro, propulsée par un quatre-cylindres turbo de 225 ch, et que nous avons eu le privilège d'essayer.
Pour le moment, une dizaine de clients ont déjà passé commande. Devalliet envisage une production d'environ 30 exemplaires par an.
Léo Mingot
Les histoires de grands rêveurs qui se lancent dans le projet fou de créer leur propre voiture de sport, on ne les compte plus. En revanche, très rares sont celles qui aboutissent réellement et dont les véhicules sortent un jour d'usine. Concernant Devalliet, qui tient un stand au Mondial de l'automobile 2022, on peut dire que l'aventure semble très bien engagée.
La production de sa Mugello a récemment démarré, mais surtout cette auto vient d'obtenir son homologation européenne (réception NKS pour la petite série avec une limite de 100 voitures par an). Le tout, avec un étonnant roadster néo-rétro fabriqué en France, au pied du massif du Vercors. À l'heure de la prolifération des SUV et de l'électrification à tout va, voilà une nouvelle qui devrait ravir les amateurs d'automobile exotique et sensationnelle !
Une Caterham à la française
Il est possible que le nom de Devalliet ne vous dise pas grand-chose, et cela ne serait pas vraiment surprenant puisque l'histoire de ce petit constructeur isérois est encore toute récente. Amateur de longue date d'automobiles sportives et baignant dans le milieu des championnats de voitures radiocommandées, Hervé Valliet démarre le projet Mugello dès 2019. Entouré de quelques passionnés, il s'appuie sur l'expertise en tôlerie fine de l'entreprise Sori, qu'il dirige depuis plus de trente-cinq ans, et conçoit un premier prototype (la voiture rouge) doté d'un bloc trois cylindres turbo Fiat de 120 ch.
Après des retours très enthousiastes du public, l'aventure se poursuit avec la production l'année suivante d'un modèle de présérie (la bleue) disposant cette fois-ci du moteur définitif, un Peugeot 1.6 PureTech de 225 ch associé à une boîte de vitesses de Mazda MX-5. Devalliet enchaîne depuis les Salons d'automobiles anciennes et s'embarque dans le véritable chemin de croix que représente l'homologation européenne. La dernière évolution apportée par la troisième voiture produite (la blanche) concerne l'adoption d'une boîte à six rapports (toujours fournie par Mazda), plus conforme aux attentes de la clientèle selon Devalliet et permettant surtout d'échapper au malus en abaissant les émissions de CO2.
Une fois devant la Mugello 375F, difficile de ne pas être impressionné. Il s'agit d'une auto radicale et minimaliste, qui ne cache pas s'être inspirée de la mythique Lotus Seven et de ses descendantes réalisées par Caterham. Le dessin, plus travaillé que celui de l'anglaise, notamment sur sa partie arrière, rappelle certaines monoplaces des années 1950 et apparaît globalement très réussi. De nombreux détails esthétiques attirent l'œil, comme le double bossage arrière avec le bouchon de réservoir chromé au centre, les roues à rayons, le gros échappement latéral ou encore les prises d'air sur les ailes avant.
Au-delà de ce look rétro, cette voiture ne s’embarrasse d'aucun superflu, les éléments de confort et autres raffinements technologiques n'étant clairement pas au menu. Pour autant, la finition se montre soignée, mêlant cuir, aluminium et bois. Elle donne un cachet indéniable à la Mugello, notamment sur le modèle blanc avec intérieur façon « havane » qui nous attend.
Prix Devalliet Mugello
La Mugello 375F réclame au minimum 79 800 €. Fait notable pour une voiture d'un tel niveau de puissance et de performances, elle n'est soumise à aucun malus en raison de rejets de CO2 annoncés à moins de 128 g/km. Merci le poids plume ! Comme sur les kit-cars britanniques, la dotation de série de ce séduisant roadster old school se résume au strict minimum : quatre roues, deux sièges, un volant. Quant au reste des éléments qui équipent habituellement les voitures modernes, ils sont globalement indisponibles, et c'est là tout l'intérêt de cette auto ! Plus sérieusement, il est vrai qu'il serait presque plus intéressant sur ce type d'engins minimalistes de citer les équipements qui ont volontairement été écartés, alors qu'ils sont devenus quasi obligatoires sur la majorité des modèles actuels.
Ainsi, l'assistance de direction n'est pas au programme. Et pour le pare-brise, la capote ou les portières souples il faudra passer par les options. En sélectionnant parmi elles le chauffage ou même la prise USB, la Mugello peut toutefois offrir un certain confort. Globalement, la personnalisation est à la carte, avec un grand choix de teintes de cuir et de finitions de planche de bord, tandis que certains « extras » sont même possibles, l'un des clients ayant par exemple souhaité ajouter un système audio. Devalliet ne communique pas les prix des options, mais la voiture la plus chère vendue à ce jour et dotée de tous les équipements possibles a été facturée environ 91 000 €. Voilà qui donne une idée du prix maximum de l'auto.
Au volant
C'est à Tullins, en Isère, que se situe la manufacture Devalliet. Le bâtiment de près de 1 000 m2 est sorti de terre l'an dernier, et c'est là que nous sommes allés à la rencontre de cette nouvelle sportive tricolore. Le modèle blanc qui nous attend est le troisième exemplaire de présérie produit et le premier à se doter de la boîte à six rapports. Alors que les nuages cachent les sommets environnants et que la pluie menace de tomber, la fiche technique de la Mugello annonce de son côté 225 ch et 300 Nm issus d'un bloc suralimenté et envoyés sur les seules roues arrière. La masse, elle, se limite à 680 kg.
De quoi permettre à l'auto d'afficher des performances proches de celles d'une Porsche 911, avec un 0 à 100 km/h en 4,9 s. Mais l'information la plus importante à garder en tête avant de s'installer à bord est que la Mugello se passe de toute forme d'assistance à la conduite, que ce soit pour la direction ou le freinage. Puriste jusqu'au bout, notre athlète du jour ne dispose pas non plus de pare-brise (disponible en option) et se dote seulement d'un petit saute-vent de série en guise de protection. Finalement, le bonnet et le pull supplémentaire mis dans le sac juste avant de partir ne seront pas de trop !
Pas besoin de parcourir des kilomètres pour s'acclimater à la conduite de la Mugello. Les premiers mètres suffisent à comprendre qu'elle n'est pas du genre à se laisser conduire négligemment, comme peuvent l'être la plupart des sportives modernes. Cette voiture réclame une implication totale de son conducteur, qui se trouve en prise directe avec les éléments et redécouvre avec bonheur des sensations devenues beaucoup trop rares dans la production actuelle. Si la préhension du fin volant Moto-Lita cerclé de bois peut surprendre de prime abord, la direction se révèle directe et précise, tandis que chaque changement de rapport est un régal grâce au petit levier en aluminium aux débattements très courts.
Le seul élément qui risque de dérouter le conducteur peu habitué à ce genre de voiture « sans filtre » est sans aucun doute le freinage. En l'absence d'assistance, celui-ci offre un ressenti forcément inhabituel. D'autant que le pédalier, articulé par le bas, réclame en outre une pression relativement forte par rapport à une voiture « normale ». Naturellement, comme toute auto de ce type, la Mugello nécessite de mettre à jour ses repères.
Même sentiment lorsque l'on se décide à écraser l'accélérateur plus fort et que l'on redécouvre alors le punch du 1.6 PureTech de 225 ch. Ce dernier se voit en effet pousser des ailes du fait de la masse contenue qu'il a ici à déplacer. Forcément, la Mugello pèse plus de deux fois moins lourd qu'une Peugeot 508 ! Reprenant sans forcer dès 1 500 tr/min, le quatre-cylindres turbo pousse vigoureusement passé 2 000 tr/min et transforme notre cigare sur roues en véritable catapulte.
Mais le plus étonnant est que, malgré sa grande rusticité et ses belles performances, la voiture se montre finalement assez confortable et très sécurisante, grâce notamment au gros travail réalisé sur ses suspensions. Celles-ci bénéficient d'une double triangulation aux quatre roues avec de grandes possibilités de réglage, parfois inspirées de la voiture radiocommandée. La Devalliet absorbe parfaitement chaque aspérité de la chaussée, et l'on ne retrouve pas le côté « sautillant » du train arrière rigide de certaines Caterham. De quoi mettre en confiance et donner envie d'exploiter un peu plus le gros potentiel de cette barquette rétro.
Le revêtement gras mouillé des routes et la pluie calmeront malheureusement nos ardeurs, nous obligeant finalement à écourter la découverte de cette passionnante auto. Néanmoins, ce galop d'essai nous aura permis de voir que Devalliet avait pleinement rempli son objectif. La Mugello fait partie de ces voitures, de plus en plus rares, qui donnent une priorité absolue au plaisir et aux sensations de conduite. D'autant que ces sensations « pures » sont accessibles à des niveaux de vitesse tout à fait raisonnables. À l'heure où la plupart des sportives deviennent de plus en plus performantes mais aussi de plus en plus aseptisées, cette démarche prend plus que jamais tout son sens.
À bord

Le cockpit de la Mugello a beau se montrer rustique, il offre un certain raffinement en mêlant cuir, chromes et bois. Comme un juste milieu entre une Morgan et une Caterham ! Certains éléments, tels que le revêtement de la planche de bord ou le cuir des sièges, peuvent être personnalisés. Léo Mingot

Ce modèle présente la finition « de base », avec cuir et revêtement de planche de bord noirs, déjà du plus bel effet. Léo Mingot

Sur ces beaux sièges en cuir, la teinte et la couleur du logo brodé peuvent être choisis selon les goûts du client. On remarque la petite boîte à gants située entre les deux sièges, comme sur une Mazda MX-5. Léo Mingot

La boîte de vitesses à six rapports provient de la Mazda MX-5. Le maniement du petit levier en aluminium, ferme et précis, est un régal. Léo Mingot
Concurrence
Parmi les concurrentes de cette Devalliet, on pense bien sûr en premier lieu à la Caterham Seven, qui demeure la référence historique pour ce type d'auto. La version 485 R, plus radicale que la Mugello dans sa définition, est un peu plus puissante et plus légère (240 ch pour 525 kg), alors qu'elle se montre dans le même temps un peu moins onéreuse (autour de 65 000 €). Mais elle est également davantage rustique avec son essieu arrière rigide (à moins d'opter pour la version CSR), tandis que la Mugello se révèle un peu plus pratique et confortable.
Chez les roadsters au style rétro, la Morgan Plus Four se retrouve dans la même fourchette tarifaire, réclamant 86 370 €. Plus bourgeoise, elle apparaît un peu plus luxueuse et moins sportive, malgré les performances assez proches que lui offre son quatre-cylindres turbo BMW de 258 ch. Enfin, on peut citer la Secma F16 Turbo, elle aussi made in France et possédant le même moteur que la Devalliet, bien qu'il soit ici placé en position centrale arrière. Le rapport poids/puissance est équivalent (225 ch pour 673 kg), mais le tarif plus léger (à partir de 36 600 €) la rend nettement plus abordable. Certes, le look est beaucoup moins « vintage » alors que la finition et le raffinement ne sont pas les mêmes, mais en termes de rapport prix/sensations elle est imbattable !
Bilan essai Devalliet Mugello 375F
Proposer une authentique voiture de sport à l'ancienne et sans aucun compromis : voilà une intention aussi rare que louable. Que cette auto réussisse en plus à être homologuée pour la route dans toute l'Europe, la chose relève pratiquement du miracle par les temps qui courent. Mais le plus étonnant au final est de voir que ce roadster pure souche apparaît particulièrement abouti et qu'il se montre à la hauteur des références du genre. En plus d'être belle, très performante et d'offrir des sensations de conduite devenues extrêmement rares, la Mugello se permet même d'être plus pratique et confortable qu'une Caterham. Le tout, avec la satisfaction de rouler dans une auto fabriquée en France par une petite équipe de gens réellement passionnés. Autant dire que cette première voiture badgée Devalliet est une réussite et qu'il nous tarde de pouvoir en reprendre le volant… sous une météo plus clémente !
On aime
- Véritable machine à sensations
- Style rétro réussi et belle finition
- Plus pratique qu'une Caterham
- Fabrication française
On regrette
- Tarif relativement élevé
- Usage exclusif (surtout sans le pare-brise)
Dimensions et poids | |
Longueur | 3,86 m |
Largeur sans rétroviseurs | 1,76 m |
Hauteur | 1,08 m |
Empattement | 2,35 m |
Volume du coffre | 280 l |
Capacité du réservoir | 34 l |
Pneus sur modèle d'essai | 205/70 VR15 |
Poids à vide | 680 kg |
Puissance et performance | |
Type de moteur | essence 4 cyl. turbo |
Cylindrée | 1 598 cm3 |
Puissance | 225 ch à 5 500 tr/min |
Couple | 300 Nm à 2 250 tr/min |
Transmission | aux roues arrière |
Boîte de vitesses | manuelle, 6 rapports |
0 à 100 km/h | 4,9 s |
Vitesse maximale | 240 km/h |
Consommation - CO2 - Malus | |
Mixte WLTP | 5,2 l/100 km |
Rejets de CO2 | 127 g/km |
Malus CO2 - 2022 | aucun |
Malus au poids - 2022 | aucun |
Puissance fiscale | 13 CV |
Garantie | 2 ans |
Pays de production | France |
Prix et équipements Devalliet Mugello
Devalliet Mugello 375F : 79 800 €
Équipement de série
Saute-vent. Pack aluminium poli (montants saute-vent, console centrale…). Arceaux chromés. Jantes à rayons peintes en gris métallisé. Différentiel à glissement limité. Sièges en cuir noir. Console centrale, accoudoirs et tableau de bord en similicuir noir. Moquette noire habitacle et coffre. Garde-boue noir satiné. Boîte à gants.
Options (tarifs non communiqués)
Pare-brise chauffant avec essuie-glaces
Kit pluie : capote, portes hautes
Couvre-tonneau
Demi-portes souples
Chauffage
Prise USB
Jantes à rayons chromées
Sièges cuir autres teintes
Console centrale, accoudoirs et tableau de bord en cuir assorti aux sièges
Échappement club