Essai extrême Kia EV6 GT : enfin la bonne électrique au Nürburgring ?
585 ch, 740 Nm de couple, un 0 à 100 km/h crucifié en 3,5 s, 260 km/h en vitesse de pointe : encore une électrique de ligne droite vite trahie par la surchauffe de ses batteries ? Ce serait mal connaître la Kia EV6 GT, qui a survolé le Nürburgring haut la main… ou presque.
La fiche technique de la Kia EV6 GT impressionne. Restait à savoir si cette sportive électrique pouvait assurer une autonomie suffisante sur circuit, et notamment au Nürburgring.
KIA EV6 GT 4WD
- - Moteur : Electrique
- - Puissance: 585 ch
- - Lancement : Novembre 2022
- - A partir de 73 990 €
- - Ni bonus ni malus
- Voir la fiche technique
Sur 42 voitures passées au grill de nos essais extrêmes au Nürburgring, trois étaient propulsées par un moteur électrique. Mais aucune n’a brillé. La lourde BMW i4 M50 s’est montrée un rien hasardeuse en virage, handicapée il est vrai par des pneumatiques inadaptés. La Tesla Model 3 Performance est apparue plus rigoureuse mais a perdu la moitié de sa puissance en moins d’un tour et ses freins en moins de trois virages. Quant à Sa Majesté Porsche Taycan Turbo S, elle est celle qui a le plus impressionné par ses performances… durant un tour seulement, avant d’échouer en mode « tortue » pour refroidir ses batteries en surchauffe.
Un relatif fiasco qui nous avait décidés à stopper les essais extrêmes en voiture électrique avant une évolution majeure de leur technologie. Puis on a essayé la Kia EV6 GT au col de Turini et on a changé d’avis. Certes organisée sur 4 km seulement, l’ascension du col alors fermé à la circulation a révélé une auto performante, efficace, équilibrée, facile, ou les qualités idéales pour affronter l’exigeante boucle nord du Nürburgring. Restait à savoir si sa brève performance allait se vérifier sur les 20 km du circuit le plus exigeant du monde.
Moteur : 18/20
Les moteurs en bref. Comme tout modèle électrique surpuissant, la Kia EV6 GT embarque deux moteurs animant chacun un essieu. Si la machine avant provient directement de l’EV6 4WD et développe toujours 218 ch, l’arrière passe de 100 ch à 367 ch grâce à un régime maximal de rotation repoussé de 15 000 à 21 000 tr/min. La nouvelle puissance cumulée culmine ainsi à 585 ch, portant l’EV6 GT au niveau des Audi RS e-tron GT (598 ch) et Porsche Taycan Turbo (625 ch), des berlines de luxe un peu plus puissantes, un peu plus lourdes et beaucoup plus chères (le double du prix de l’EV6 !).
Notre avis. Pas de véritable fonction Launch Control en Kia EV6 GT, qui ne brise pas la nuque au décollage façon Audi RS e-tron GT ou Porsche Taycan Turbo S. Le 0 à 100 km/h, qui reste tout de même expédié en 3,5 s, laisse sur place la plupart des sportives thermiques contemporaines et demeure bien suffisant pour chambouler les sens. Une sonorité artificielle peut se mêler aux catapultages en singeant tantôt un soufflement de moteur électrique (c’est à-propos), tantôt une soucoupe volante (pourquoi pas ?), tantôt un moteur thermique (franchement raté). Même sans un bruit, ni boîte à deux rapports des allemandes précitées, les relances demeurent impressionnantes et ont surpris moult sportives légendaires sur la boucle nord : BMW Série 1 M, BMW M4 et Porsche 991 Carrera S turbocompressée pour ne citer qu’elles.
Le plus bluffant ? Que la puissance n’ait pas chuté au fil du parcours, même après les 3 km de pleine charge précédant le fameux virage du Carroussel. Tout juste a-t-on senti une légère régression des relances quand le niveau de charge est passé sous les 30 %, puis une seconde sous les 15 % sans que l’auto ait été réellement bridée (l’EV6 GT dépassait encore les 200 km/h à ce stade !). La consommation fut la dernière bonne surprise, avec 92 kWh aux 100 km affichés à l’ordinateur de bord quand les BMW i4 M50 et Porsche Taycan Turbo S dépassaient les 130 kWh à ce rythme. De quoi assurer trois tours avec pile abreuvée à 100 % sans terminer en souffrance. Au Nürburgring, en électrique, c’est pour l’heure unique !
Châssis : 14/20
Le châssis en bref. Par rapport à l’EV6 standard, l’EV6 GT est à peine abaissée. La suspension passive est toutefois remplacée par une pilotée, quatre Michelin Pilot Sport 4S viennent sur d’immenses jantes de 21 pouces, alors qu'un différentiel à glissement limité piloté électroniquement est greffé sur le train arrière. Ce dernier est capable de moduler le couple disponible de 0 à 100 % sur l’une des roues, permettant à l’EV6 GT de proposer un mode Drift. Futile au Nürburgring, où nous convoquerons plutôt le mode de conduite GT voire MyMode, permettant d’isoler les réglages de chaque élément (puissance, direction, suspension…). En mode Sport, la suspension est durcie jusqu’à 30 % par rapport à l’EV6 Standard, puis de 30 % supplémentaires en mode Sport+ qui sera utilisé pour notre session de circuit.
Notre avis. Comme au col de Turini, nous retrouvons les qualités de l’EV6 GT : train avant incisif, direction précise et directe, mouvements de caisse bien contenus en virage ou sur les bosses. Le poids se rappelle cependant au souvenir du conducteur une fois l’EV6 poussée à sa limite, notamment quand le train arrière, dont les pneus grimpent vite en température, dérive facilement à l’inscription puis réclame un certain temps avant de rejoindre la bonne trajectoire. À l’inverse, les réaccélérations en sortie de virage serré ont tendance à faire tirer la voiture tout droit, ne rappelant pas l'attitude légèrement survireuse des Porsche, Tesla et Ford Mustang Mach-E GT en pareille situation.
Une tendance inattendue vu la puissance supérieure sur le train arrière et la présence du différentiel piloté censé faire pivoter l’auto plutôt que la pousser vers l’extérieur. Mais relativisons. L’EV6 GT assure déjà de jolies vitesses de passage en virage et ne se désunit que si l’on provoque son train arrière en entrée ou si l’on ne prend pas la peine de doser l’accélération en sortie, ESP débranché. La qualité d’amortissement achève de convaincre en absorbant efficacement les bosses, même en mode le plus ferme. Remarquable vu le confort parallèlement assuré sur route ouverte à faible allure malgré les pneus à flancs très bas.
Freinage : 16/20
Le freinage en bref. Pour arrêter efficacement ses 2,2 t tractées par 585 ch, l’EV6 GT ne fait pas confiance au célèbre fournisseur italien Brembo mais au japonais Akebono. Les disques arrière passent à 360 mm de diamètre et ceux avant à 380 mm… comme sur une Porsche 991 GT3 RS ! Des étriers fixes à quatre pistons se chargent de pincer les plaquettes avant, quand les arrière restent actionnés par des modèles flottants.
Notre avis. Avant d’actionner les grosses mâchoires de frein de l’EV6 GT, il faut d’abord s’habituer au freinage récupératif, possiblement puissant. En mode de récupération maximale réglable depuis les palettes au volant, la puissance de régénération culmine à 150 kW ! Suffisant pour adopter une conduite rapide sans chercher le meilleur des chronos, mais la coréenne ne s’appuie pas uniquement sur cette astuce pour compenser un quelconque manque d’endurance du freinage hydraulique.
Ce dernier n’a ainsi montré aucun signe de surchauffe sur cette piste certes peu exigeante en matière de ralentissements. Sur ce point, la Tesla Model 3 Performance est très largement battue, alors que la Porsche Taycan devait s'équiper de sa coûteuse option carbone-céramique pour ralentir sans histoire. Encore une bonne surprise venue de l’EV6 GT… précisément plus dynamique qu’un modèle Grand Tourisme !
Bilan de l’essai extrême Kia EV6 GT
- Vendue deux fois moins cher que la Porsche Taycan Turbo S (et la Tesla Model S Plaid, aussi détentrice d’un record au Nürburgring), la Kia EV6 GT y a presque davantage brillé. La raison ? Une remarquable gestion thermique de sa batterie, qui permet d'enchaîner trois tours de boucle nord sans presque rien perdre de sa puissance initiale. Aucune autre électrique n’avait réussi pareille prouesse, ni celle de conserver l’efficacité de son freinage sans recourir à une coûteuse option carbone-céramique. Poids élevé, dimensions de crossover et train arrière à « surveiller » à haute vitesse ne font évidemment pas de l’EV6 GT une arme pour la piste, mais cette auto nous amène à rêver d’un vrai modèle sportif Kia, plus bas, plus léger, et dès lors plus agile. La rapidité de recharge achève de convaincre, puisque la batterie en 800 V permet de la régénérer de 10 à 80 % en moins de 20 minutes. Durée tout à fait acceptable en utilisation circuit, à condition que des bornes de charge rapide y soient implantées… ce qui n’est pas le cas au Nürburgring, superchargeurs Tesla mis à part.
On aime
- Les performances élevées ET constantes au fil des tours
- L’autonomie et la rapidité de recharge, acceptables sur piste (si borne rapide > à 239 kW)
- La facilité de conduite à rythme rapide…
On regrette
- … mais l’équilibre plus délicat à haute vitesse
- Le poids toujours élevé, qui fait souffrir les consommables (usure et pression des pneus)
- Les sensations de conduite edulcorées, malgré les hautes performances
Fiche technique Kia EV6 GT | |
Dimensions et poids | |
Longueur | 4,69 m |
Largeur sans rétroviseurs | 1,89 m |
Hauteur | 1,54 m |
Empattement | 2,90 m |
Volume du coffre | 480 l |
Pneus sur modèle d'essai | 255/40 ZR21 |
Poids à vide | 2 200 kg |
Puissance et performances | |
Type de moteur | électrique, un à l'avant et un à l'arrière |
Puissance | 585 ch |
Couple | 740 Nm |
Transmission | aux 4 roues |
Boîte de vitesses | monorapport à réducteur |
0 à 100 km/h | 3,5 s |
Vitesse maximale | 260 km/h |
Batterie, autonomie et consommation | |
Type de batterie | lithium-ion polymère |
Capacité utile de la batterie | 77,4 kWh |
Puissance du chargeur AC - DC | 10,5 kW - 239 kW |
Consommation mixte WLTP | 20,6 kWh/100 km |
Autonomie mixte WLTP | 424 km |
Temps de charge de 10 à 100 % | |
Prise domestique 8 A | 32 h 45 |
Borne AC 11 kW | 7 h 20 |
Borne DC > 100 kW (10 à 80 %) | 18 min (239 kW) |
Bonus et garantie | |
Bonus 2023 | non |
Puissance fiscale | 11 CV |
Garantie voiture | 7 ans ou 150 000 km |
Garantie batterie | 7 ans ou 150 000 km |
Pays de production | Corée-du-Sud |