Essai extrême : le Nürburgring en Audi RS3 Sportback 2022 !

Forums spécialisés, réseaux sociaux ou rassemblements physiques voient souvent s’écharper deux catégories d’amateurs de GTI. Ceux qui bénissent les allemandes et leurs puissances surnaturelles (Audi RS3 de 400 ch, Mercedes-AMG A 45 S de 421 ch) et les autres, pour qui l’efficacité en virage vaut mieux qu’un record d’accélération (Mégane RS Trophy-R, Honda Civic Type R Limited Edition). Pour sa troisième génération de RS3, Audi a souhaité réconcilier tout le monde. Et entourer son fabuleux 2.5 turbo à cinq cylindres (le dernier du marché !) d’un châssis tout aussi épicé.

Sa recette secrète ? Un nouveau différentiel arrière sachant distribuer 50 % du couple vers la roue gauche ou droite, ce qui limite la tendance au sous-virage à la réaccélération voire, dans un mode RS Torque Rear dédié, provoque du survirage façon propulsion débridée. En mode RS Performance, l’heure n’est plus à la déconne mais à l’efficacité puisqu’une fois celui-ci enclenché l’Audi RS3 sait parcourir les 20,8 km de la boucle nord du Nürburgring en moins de 7 minutes et 41 secondes (aux mains du pilote officiel Audi Sport Frank Stippler). C’est 4,5 s de moins qu’une Mégane Trophy-R, certes 100 ch moins puissante mais aussi 340 kg moins lourde ! Si notre RS3 Sportback d’essai n'embarquait pas les freins céramique (voir plus bas au chapitre dédié), elle disposait tout de même d’une option capitale dans la réalisation de son chrono : quatre pneus Pirelli Trofeo R, dont le grip nous a si-dé-ré.

Châssis : 19/20

Le châssis en bref. Au-delà de son différentiel arrière actif décrit en introduction, l’Audi RS3 repose sur un châssis abaissé de 25 mm par rapport à celui de l’A3 classique et de 10 mm par rapport à celui de la S3. La suspension pilotée optionnelle réduit encore l’assiette de 10 mm alors que les ressorts, amortisseurs, barres antiroulis, triangles inférieurs avant et porte-moyeux deviennent spécifiques. Le contre-carrossage a ainsi pu être augmenté par rapport à celui d'une A3 (+ 1° à l’avant, + 0,5° à l’arrière) afin de mieux faire travailler les pneus, dont la largeur demeure asymétrique : 265 mm devant, 245 mm derrière ! Contre 710 € à la commande, les Pirelli P Zero de série cèdent leur place aux fameux Trofeo R à profil semi-slick.

Notre avis. Déjà séduit par les réactions rigolotes de la RS3 2022 lors de notre premier essai sur route, nous découvrons au Nürburgring une autre facette de sa personnalité. Il faut dire que les Pirelli Trofeo R décuplent l’adhérence à condition, comme d’autres gommes du même type, d’avoir été montés en température puis ajustés aux bonnes pressions. Quand c’est le cas, le grip est tel qu’il rappelle celui d’un vrai pneu slick de compétition, repoussant les limites du sous-virage à un niveau inconnu, même dans les portions les plus serrées du Nürburgring.

En insistant vraiment, la RS3 Sportback finit par perdre l'adhérence en sautillant plutôt qu’en glissant, rappelant les réactions des kartings de compet’. Sidérant, aux commandes d’une auto de 1 645 kg ! Ce grip surnaturel ne rend même pas l’équilibre ennuyeux, puisque le train arrière sait rester coopératif en entrée de virage serré, voire chatouilleux sur les zones de délestage abordées à haute vitesse. En mode RS Performance, qui privilégie la neutralité de la transmission à la réaccélération (le drift n’est jamais bon pour le chrono !), il est d’ailleurs possible de basculer la suspension pilotée de Dynamic à Confort pour mieux absorber les portions dégradées de la boucle nord.

Lors de notre tour filmé, l’Audi RS3 a pu tenir tête à une Porsche 992 GT3 de 510 ch, qui chaussait des Michelin Pilot Sport Cup 2 classiques et non des Cup 2 R comparables aux Pirelli Trofeo R de la RS3. S’équiper de cette monte permet donc de titiller plus gros que soi, à condition de bien surveiller les pressions et d’accepter une usure logiquement rapide. Au bout de quatre tours de boucle nord du Nürburgring (soit 80 km), la profondeur « utile » des sculptures semblait avoir fondu de moitié. Mais l’usure s’est effectuée bien à plat, prouvant la rigidité des flancs supportant plus de 1,6 t… à l’arrêt.

Freinage : 17/20

Le freinage en bref. De série, l’Audi RS3 embarque des disques avant de 375 mm (310 mm à l’arrière) pincés par des étriers fixes à six pistons. De nouveaux conduits d’air devant les triangles optimisent leur refroidissement alors que les plaquettes, dont la surface a crû de 15 %, ont chassé le cuivre de leur composition. Des disques avant céramique de 380 mm sont disponibles en option à 5 500 € pour mieux résister à la chauffe et réduire les masses non suspendues de 10 kg.

Notre avis. Contrairement à la version utilisée pour le chrono officiel, notre RS3 d’essai conservait les disques en acier de série. Malgré les vitesses atteintes, le poids de l’auto et le grip des pneumatiques permettant de retarder ses points de freinage, le système n’a pas déclaré forfait sur ce circuit, certes peu exigeant sur ce point : les forts ralentissements sont rares et séparés de plusieurs kilomètres, laissant aux garnitures le temps de refroidir.

L’efficacité est demeurée constante au fil des tours, comme la sensation de mordant à la pédale. Le dosage est même apparu plus aisé qu'avec les freins céramique testés lors de notre premier essai du véhicule sur un circuit près d’Athènes ; l’ABS se déclenchait plus facilement à l'occasion d’une attaque franche de pédale. Comme pour toute voiture de série utilisée sur piste, il reste bien sûr important d’observer des séances de refroidissement entre deux tours (quelques kilomètres à 80 km/h sans trop freiner suffisent) pour éviter de « glacer » les plaquettes.

Moteur : 18/20

Le moteur en bref. Élu « Moteur international de l’année » neuf fois de suite depuis 2010, le célèbre 2.5 turbo Audi à cinq cylindres n’évolue que subtilement. La puissance maxi stagne à 400 ch mais devient disponible sur une plus large plage de régimes (de 5 600 à 7 000 tr/min désormais). Quant au couple, dont la courbe ressemble elle aussi à une droite (500 Nm constants de 2 250 à 5 600 tr/min !), il croît de 20 Nm par rapport à la génération précédente. La conservation de ce bloc mythique se paie hélas en termes de malus en France. Malgré l’arrivée d’un mode Efficiency (qui limite la puissance à 80 % et autorise un mode roue libre à la décélération), la RS3 doit s'acquitter de 22 000 € d’écotaxe au minimum.

Notre avis. Contraint d’adopter des filtres à particules pour respecter les dernières normes antipollution, le cinq-cylindres d'Audi exhale une voix légèrement plus étouffée qu’auparavant, même avec l'échappement sport RS optionnel (1 200 €). La sonorité reste tout de même attachante, surtout en modes de conduite Dynamic et RS, qui libèrent les valves du silencieux. Le timbre rauque et inimitable du cinq-cylindres revient alors, pour le plus grand bonheur des nostalgiques d’Audi Quattro Groupe B. C’est bien moins sonore, mais on reconnaît les accords !

La poussée brutale ne gâche rien, malgré le creux sous 2 500 tr/min qui décuple finalement les sensations quand déferlent subitement les 500 Nm de couple. La suite du concert n'ennuie guère avec une poussée constante jusqu’à la zone rouge et des prises de vitesse dignes des supercars. Lors de notre test d’accélération sous régime de Launch Control, le 0 à 100 km/h a été abattu en 3,8 s (comme annoncé) et le 0 à 200 km/h en 12,5 s, avant que la RS3 ne bute sur sa bride électronique, repoussée en option à 280 km/h sur notre modèle d’essai (soit 288 km/h au compteur !). La vitesse est limitée à 250 km/h de série. Toutefois, elle peut aussi culminer à 290 km/h avec le pack Dynamic RS incluant la suspension pilotée, les modes RS Torque Rear et RS Performance, mais impliquant aussi les onéreux freins céramique.

Boîte : 16/20

La boîte en bref. Un temps proposée sur l’Audi TT RS à cinq cylindres, la boîte mécanique n’a jamais été disponible sur la RS3. Cette génération conserve donc la transmission robotisée S tronic à double embrayage et sept rapports, qui perd sa commande manuelle au levier depuis qu'un petit basculeur en aluminium la remplace. Nous ne sommes donc pas chez Porsche, où la 911 GT3, même PDK, récupère un vrai levier plutôt que le petit « domino » des 911 classiques.

Notre avis. Comme la plupart des boîtes robotisées du groupe Volkswagen, celle de la RS3 souffre d’une gestion un rien caricaturale en automatique. Les rapports passent à très bas régime en mode D, puis s’éternisent à haut régime en mode Sport même si la pression sur l’accélérateur reste faible. La boîte de la RS3 laisse aussi apparaître quelques patinages à faible allure, notamment après un démarrage à froid.

Mais il suffit de basculer en mode Manuel pour éradiquer ces défauts. Commandable uniquement depuis les petites palettes solidaires du volant, il offre même une bonne surprise en évitant les défauts de ses « cousines » lors d’une conduite dynamique : pas de passage automatique du rapport supérieur à l’approche de la zone rouge et rétrogradages possibles même à haut régime. Plus rapides à la montée qu’à la descente, les passages de vitesse restent éclairs et ne génèrent aucun à-coup artificiel comme on peut le voir chez certaines rivales pour décupler les sensations. À dire vrai, la RS3 n’a pas besoin de cela…

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