Essai Honda e : le test vérité sur son autonomie
Première Honda 100 % électrique, la nouvelle "e" mise sur son craquant emballage pour séduire les citadins branchés. L'exhiber devant leur maison de campagne sera toutefois difficile, vu les résultats de notre test d'autonomie en conditions réelles.
A l'occasion de sa commercialisation, la Honda e électrique s'est livrée à un essai pour jauger son autonomie en conditions réelles, sur route et autoroute.
Avec sa bouille revisitée de bombinette des années 80, ses écrans géants en guise de planche bord et son architecture originale (roues motrices et moteur à l’arrière), la Honda e réussit ce que les autres électriques font rarement : envie. Vient ensuite la lecture des tarifs (38 060 € pour cette version 154 ch avant bonus écologique) et celle de l’autonomie homologuée, décevante par rapport aux dernières citadines sur prise : 205 km avec les roues de 17’’, contre 340 km pour une Peugeot e-208 et 390 km pour une Renault Zoé, à la fois moins chères et plus vastes.


Il n’en fallait pas moins pour éveiller notre curiosité mal placée, et étalonner la Honda e sur notre parcours test pour voiture électrique. Au programme ? 109 km d’autoroute A4 entre Paris et Reims pour jauger l’autonomie sur longs trajets, puis un retour par les routes secondaires et les villages (140 km) pour connaître le rayon d’action du quotidien. Notre première tentative ne s’est hélas pas déroulée comme prévu…
Après une charge complète sur secteur la veille (19H sur prise domestique, ou 6H sur une Wallbox 7,4 kW), la Honda e a déjà siroté 15 % d’énergie sur les 25 km nous séparant du point de départ. Nous la rebranchons donc sur la borne de départ mais avec l’unique câble livré de série (pour prise classique), atteindre 100 % réclame 4 nouvelles heures de charge. Au bout d’une heure, la jauge dépasse les 90 % qui devraient suffire pour le trajet aller sur autoroute. Perdu : après 40 km avalés à 130 km/h avec un léger vent de face, l’autonomie affichée s’écroule de 173 km à… 59 km, soit moins qu’il n’en faut pour atteindre l’arrivée du premier parcours !
Les 40 kilomètres suivants s’effectueront donc à 110 km/h et les 20 derniers à 80 km/h, histoire d’éviter la panne sèche et juger l’efficacité des écrans de rétrovision qui affichent souvent des poids-lourds excédés. Pardon, amis routiers… Ce piètre score a d’abord semé le doute dans notre esprit (notre Honda e d’essai aurait-elle un problème ?), et nous a conduit à échanger ce modèle (blanc) par un autre (bleu) pour en avoir le cœur net. C’était reparti, ou presque.
Quelle autonomie sur autoroute ?
Nouvelle tentative dans des conditions plus favorables : auto chargée à 100 % au départ et absence de vent de face. Nous rejoignons cette fois le point d’arrivée… non sans « serrer les fesses » : 3 % de batterie restante et une jolie tortue affichée au tableau de bord (elle apparaît sous 5 % environ et limite la puissance) après les 109 km parcourus à 130 km/h au GPS.
La déception croît encore après nos calculs (pourcentage de batterie consommée, rapportée à sa capacité et au kilométrage parcouru) car la consommation de la « e » s’est ici établie à 31,6 kWh aux 100 km, au lieu des 25,3 kWh annoncés par l’ordinateur de bord. C’est le plus mauvais score enregistré lors de nos tests : 11,6 kWh de plus que la petite Volkswagen e-up! essayée récemment, et toujours 2,5 kWh de plus qu’un SUV DS3 Crossback E-Tense particulièrement gourmand à 130 km/h. La troisième vérification (effectuée en sens inverse pour contourner l’incidence d’un hypothétique vent défavorable) débouchera sur le même résultat... Dès lors ? Mieux vaut éviter l’autoroute en Honda e, ou y rouler sous les limitations de vitesse pour espérer dépasser les 110 km de rayon d’action...
Parcours autoroute | Départ | Arrivée |
Niveau de batterie | 100 % | 3 % |
Autonomie indiquée à l'ordinateur | 173 km | 5 km |
Kilométrage parcouru | 109 km | |
Conso. estimée aux 100 km* | 31,6 kWh | |
Autonomie estimée à 130 km/h* | 112 km |
(*) valeurs calculées en fonction du pourcentage de batterie consommée (97 % ici) et sa capacité utile (35,5 kWh)
C’est dommage car hormis cette gourmandise, la Honda e ne montre aucun complexe sur voies rapides : ses 154 ch expédient les redémarrages au péage comme les relances après qu’un poids-lourd a squatté la file de gauche (sans rancune, ami routier !), les bruits d’air n’envahissent pas trop l’habitacle et l’aide au centrage dans la voie s’est curieusement montrée plus agréable que celle de la Honda Jazz hybride, l’autre citadine de la gamme : pas de volant qui oscille en permanence, juste un régulateur de vitesse adaptatif un peu "chatouilleux" lors des dépassements de camions.
Coût et durée de la recharge rapide
Acceptant les charges en courant continu jusqu’à 50 kW, la Honda e promet seulement 31 min pour recouvrer 80 % de « jus ». Une fois branchée avec 3 % d’énergie restante, l’auto annonçait plutôt 1H10 jusqu’à 100 % car la puissance diminue nettement pour régénérer le dernier quart. Remarque vérifiée : seulement 15 min pour approcher 50 % de charge, puis 45 min supplémentaires pour atteindre 97 % (la charge rapide s'est coupée avant 100 % lors de nos deux tentatives).


Rien d’anormal ici (la e-up! s’était montrée plus lente à recharger, tolérant 40 kW maxi), mais la consommation élevée de la Honda e n’arrange guère le coût d’utilisation du réseau Ionity : à 0,79 € par kWh délivré, le plein nous aura coûté 20 €. Un billet bleu pour parcourir 110 km ? Le budget carburant d’une Ford Mustang V8 est dépassé.
Quelle autonomie sur route ?
Retour en Honda e blanche, dont la consommation n’avait finalement rien d’anormale. Dès les premiers ronds-points, nous retrouvons le sourire : la direction directe sert l’agilité en virages, les 315 Nm de couple expédient les relances et le freinage se montre assez facile à doser, qualité rare chez les voitures électriques. A la décélération, la Honda e propose six niveaux de frein moteur (trois en mode normal, trois plus puissants en mode « one pedal » qui dispense d’utiliser la pédale de frein pour arrêter la voiture) en fonction des conditions ou du goût de chaque conducteur.

Au volant, on ne ressent pas les 1 537 kg avoués par la citadine qui, pour ne rien gâcher, se montre confortable sur petites routes dégradées comme sur les dos-d’âne des villages traversés. Et l’autonomie dans tout ça ? Bien moins angoissante dans ces conditions, qui sollicitent moins le moteur et permettent davantage de récupération d’énergie à la décélération (entrées de villages, arrivées sur les giratoires, etc). Mais une nouvelle fois, la consommation affichée à l’ordinateur de bord (17 kWh) se révèle inférieure à la consommation réelle selon nos calculs :
Parcours route | Départ | Arrivée |
Niveau de batterie | 97 % | 16 % |
Autonomie indiquée à l'ordinateur | 147 km | 25 km |
Kilométrage parcouru | 140 km | |
Conso. estimée aux 100 km* | 20,5 kWh | |
Autonomie estimée* | 173 km |
(*) Valeurs calculées en fonction du pourcentage de batterie consommée (81 % ici) et sa capacité utile (35,5 kWh)
A 20,5 kWh aux 100 km, la Honda e autorise un rayon d’action de 173 km, largement compatible avec un usage quotidien mais toujours très inférieur aux autres modèles 100 % électriques. Tous ont fait mieux sur ce parcours routier, de la e-up! (11,5 kWh/100 km et 280 km d’autonomie estimée) à la Renault Zoé (17 kWh et 304 km) en passant par la Tesla Model 3 Autonomie Standard (13,5 kWh et 378 km !). Aller, un petit coup d’œil vers la Honda e, ses yeux attendrissants et son habitacle cocooning, et tout sera pardonné...
Et la ville ?
Pas de mesure en ville lors de nos tests : le nombre de kilomètres parcourus dans une journée reste faible et les bornes de recharge y sont plus nombreuses. C’est pourtant le vrai royaume de cette Honda e : gabarit réduit (3,89 m de long, soit 19 cm de moins qu’une Renault Zoé), commandes douces, confort moelleux à basse vitesse, et un rayon de braquage « magique » de 4,3 m qui permet presque d’accomplir les demi-tours sur soi-même !
Convaincante sur route, la rétrovision par caméras réclame davantage d’adaptation dans un trafic dense pour jauger la proximité des autres usagers. Lors des stationnements, mieux vaut faire confiance aux caméras à 360° projetées sur le lisible écran central. Seul petit défaut dans ces conditions urbaines : le mode « une pédale », qui manque de progressivité au moment de l’arrêt (freinage non dégressif) et invite finalement à le désactiver.
La Honda e dans le détail







Bilan de l’essai Honda e
Géniale en ville, amusante sur route, craquante partout, la Honda e échoue à montrer la polyvalence des récents modèles 100 % électriques lors des envies d’évasion. Avec à peine 110 km de rayon d’action à 130 km/h, les longs trajets ne sont clairement pas envisageables, du moins avant que le réseau de bornes rapides se densifie sur autoroute (bornes Ionity rares, bornes EDF toujours désactivées en France). La Honda e s’adresse donc aux foyers aisés, à même de débourser plus de 30 000 € pour une seconde voiture…

On aime
- La conduite ludique malgré le poids élevé
- La présentation générale, craquante
- Le confort, moelleux pour une citadine chaussée en 17’’
On regrette
- La consommation élevée, notamment sur autoroute
- Le coffre riquiqui et le dossier arrière rabattable d’un seul tenant
- Le prix trop élevé pour une citadine