Essai Renault 5 Turbo Coupe d’Europe : retour en piste à Magny-Cours !
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Essai Renault 5 Turbo Coupe d’Europe : retour en piste à Magny-Cours !

Entre 1981 et 1984, une coupe de marque organisée par Renault faisait s’écharper des R5 Turbo presque de série sur les plus belles pistes européennes. Nous essayons celle d’un certain Jean Ragnotti sur l’amusant circuit club de Magny-Cours.

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Très proche de la version de série, la R5 Turbo Coupe d'Europe se présente ici dans la livrée utilisée par Jean Ragnotti dans le championnat d'époque.

Clément Choulot

Si vous débutez cette lecture, c’est sans doute que vous êtes passionné de voitures en général, sportives ou anciennes en particulier. Mais au risque de vous froisser, cher lecteur, je dois vous glisser un secret : certains monuments automobiles se révèlent plus sympas à désirer qu’à conduire. À force d’en lire les louanges dans la presse automobile de l’époque, d'écouter les anciens dire qu'« on n’a pas fait mieux » et de voir leur cote dépasser celle de sportives modernes, peut-être les plaçais-je trop haut sur l’échelle de la coolitude. Si on s'assied deux minutes, franchement : vous le regrettez tant que ça le caractère moteur quelconque d’une 205 GTI 1.9 ? La commande de boîte exécrable d’une R5 Alpine ? La position de conduite archaïque d’une R8 Gordini ?

Objectivement (sans donc convoquer ni quelconque nostalgie ni souvenir personnel d’une époque révolue), les prestations de ces sympathiques titines sont en total décalage avec le prix qu’elles valent aujourd’hui et, le pire, c’est qu’elles n’y sont pour rien. Non sans appréhension, je répondais toutefois à l'invitation de Renault pour essayer l’une de celles qui me faisaient le plus rêver gamin, la R5 Turbo. Pas la moindre : une version Coupe d’Europe ou « Europa Cup » comme elle est souvent nommée par les anglicistes.

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Clément Choulot

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Clément Choulot

R5 Turbo Coupe d'Europe, kézako ?

Tout le monde connaît la R5 Turbo, la vraie, son 1.4 turbo de 160 ch en lieu et place de la banquette, ses ailes arrière hypertrophiées et, contrairement à la Turbo 2 qui l’a remplacée, son cockpit inimitable signé Bertone. Mais aussi ses éléments de carrosserie en alu (portières et pavillon, pour être précis). Ce génial pot de yaourt de 970 kg servait de base à notre fameuse coupe d'Europe, une déclinaison de compétition que brusquaient Jean Ragnotti, Walter Röhrl et moult amateurs sur douze courses par saison, dont sept en lever de rideau des Grands Prix de F1 et une aux 24 Heures du Mans. Plus sauvage que les R5 Alpine animant la précédente coupe d’Europe (traction, 93 ch…), la R5 Turbo l’était tout de même moins que les célèbres déclinaisons de rallye, puisque la Tour de Corse crachait 280 ch et la Maxi 5, 350 ch !

Ainsi, hormis un sommaire arceau de sécurité boulonné et deux paires de pneus semi-slicks, rien ne distingue cette compétitrice des R5 Turbo de série : planche de bord intacte, sièges itou et même une plaque numérotée si appréciée des collectionneurs (la nôtre porte le n° 97 sur les 1 690 Turbo et 3 167 Turbo 2 produites). Sous le capot, ou plutôt sous la tôle recouverte de moquette orange derrière les passagers, officie toujours le 1.4 turbo de 160 ch relié à une boîte mécanique à cinq rapports. Dans cette ambiance presque cossue il fait déjà chaud, comme nous le confirme notre copilote de luxe, Alain Serpaggi.

Ancien pilote et ambassadeur de Renault Sport, ce vaillant octogénaire a participé à la mise au point des R5 Turbo de série et de compétition. Il remporta même le championnat de France de deuxième division à son volant, face à une horde de Porsche 911. « Au début de la mise au point, l’ennemi, c’était la chaleur. Aucun équipement n’était habitué à fonctionner avec des températures aussi élevées. Câbles, faisceaux, garnitures, tout brûlait ! Il a donc fallu travailler sur le refroidissement du moteur, et aussi sur celui de l’habitacle, notamment pour les versions de série », nous explique-t-il. Vu la température intérieure à l’arrêt par cette météo frisquette, on imagine la fournaise que devaient être les premiers prototypes…

Au volant

Quatre tours, pas un de plus, sur le circuit club de Magny-Cours long de 2,5 km. Soit 10 km au guidon de cette sauvageonne au comportement attendu fantasque… En ligne droite, je peux au moins briser la glace avec le moteur qui me surprend en bien. Très sage sous 3 500 tr/min, comme la plupart des turbos de l’époque, le 1 397 cm3 ne comprime personne au fond du siège façon électrique moderne mais s'éveille progressivement, pousse, s’affirme puis pétille jusqu’à 6 500 tr/min et la zone orange dans un vacarme rauque et réjouissant. Au bout de la ligne droite, on passe tout juste le cinquième et dernier rapport et le sourire, lui, est monté jusqu'aux oreilles. N’est-ce pas le plus important ?

Si le freinage n’impressionne pas plus que la précision de la commande de boîte à pommeau carré, la direction non assistée ravit déjà par sa précision. Au point d’inviter à hausser le rythme dès la longue parabolique gauche. La vitesse augmente, l'effort dans le volant aussi, mais le train avant reste rivé à sa trajectoire sans l’once d’un sous-virage. Moi qui m'attendais à une citadine à tête chercheuse…

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Si les pneus semi-slick garantissent un joli grip, le train arrière se décale rapidement au lâcher d'accélérateur.

Clément Choulot

L’efficacité de la proue est confirmée dans les virages plus serrés, abordés avec davantage de rythme mais pas plus de sous-virage. Retour dans la longue parabolique, encore plus vite, le train avant ne capitule toujours pas, mais à ce rythme il faut désormais se concentrer sur l’arrière. Un soulagement d’orteil sur l’accélérateur ? Le voilà qui se décale, sans décrochage violent ni coups de raquette, comme une main géante qui ferait pivoter ce jouet dans le bon sens pour la sortie. Léger contre-braquage, gaz à fond et ça repart… Quel pied !

Une fois saisi le mode d’emploi, on se sert de ce second volant pour aider l’auto à tourner, notamment dans le pif-paf-pif très serré du circuit club de Magny-Cours, toujours incommodant avec les autos actuelles. En modulant sa pression sur l’accélérateur et sans presque mettre d’angle au volant, la R5 pivote là où les sportives modernes se vautrent en sous-virage, et l’enchaînement devient jouissif avant une réaccélération joyeuse qui fait légèrement cirer la roue intérieure. 

« Cette auto, c’est génial ! » lance tout sourire mon copilote de luxe Alain Serpaggi, pas blasé malgré les milliers de kilomètres parcourus à son guidon. J’aurais hurlé la même chose si je n’étais pas si ému, bluffé de prendre tant de plaisir aux commandes de cette madeleine de Proust injustement redoutée, si simple, si pure et si merveilleuse à piloter. Alors, si vous êtes restés jusque-là, chers passionnés, merci de ne pas relire mon introduction… La R5 Turbo, quelle auto !

Bilan de l'essai R5 Turbo Europa Cup

Parfois scabreuses, souvent poussives, les sportives d’époque peinent parfois à justifier leur formidable aura quand elles sont reconduites quarante ans après leur naissance. La R5 Turbo Coupe d’Europe nous fait mentir. Pétillante côté moteur, passionnante côté châssis, elle dégage une joie de vivre qui ferait fondre les plus réfractaires aux anciennes. Une belle surprise que ne fera pas oublier sa descendante sur prise, la R5 Turbo 3 E, essayée le même jour.

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Présenté en 2022 pour les 50 ans de la Renault 5, le concept R5 Turbo 3 E roule désormais à l'électricité.

Renault

Fiche technique R5 Turbo Europa Cup (1981-1984)
DIMENSIONS
Longueur 3,66 m
Largeur 1,75 m
Hauteur 1,32 m
Réservoirs d'essence 93 l
Pneus 190/55 HR340 à l'AV, 225/55 VR365 à l'AR
TECHNIQUE
Moteur 4 cylindres en ligne, turbo
Cylindrée 1 397 cm3
Puissance 160 ch à 6 000 tr/min
Couple 206 Nm à 3 250 tr/min
Transmission aux roues arrière
Boîte de vitesses mécanique, 5 rapports
Poids à vide 970 kg
PERFORMANCES
0 à 100 km/h 6,9 s
Vitesse maxi 200 km/h
PRIX
Prix du neuf en 1981 115 000 F (R5 Turbo série)
Cote en 2023 entre 100 000 et 150 000 €
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Dobermann Le 14/05/2023 - 10:46
La vidéo n’est absolument pas représentative, mauvaise vu et pilote qui fait du tourisme ! J’ai eu deux 5turbo2 à l’île de la Réunion, c’est une voiture extraordinaire pour la montagne et 160 cv pour 950 kg ça d’exploité AU MAX et c’est ça qui est bon un véritable plaisir de pilotage en propulsion pure, se faire POUSSER et non pas TIRER…les puristes comprendront. Actuellement comment peut on exploiter même 400cv et prendre plaisir ???? J’aimerai qu’on m’explique…(je ne parle pas bien sûr de la Nordschlaffe,OK ??? Merci.
Limousine Le 14/05/2023 - 08:54
Tout le sujet de regarder les choses d’hier avec les yeux d’aujourd’hui. Seuls ceux qui ont connu l’époque sont réellement capables de faire la part des choses. Être et avoir été en même temps, ne dure malheureusement pas. Ces voitures étaient fantastiques à leur époque et restent des marqueurs de leurs temps. Indépendamment de toute valeur marchande.
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