Fin des moteurs thermiques en 2040. Un objectif vraiment réaliste ?
La loi d'orientation des mobilités a fixé une date pour la fin des « voitures à énergies fossiles carbonées » : 2040. Un horizon qui peut sembler encore lointain, mais la réalisation de cet objectif s'annonce déjà comme un vrai casse-tête pour les constructeurs automobiles.
D'abord envisagée pour 2040, la fin de la vente des voitures à moteur thermique en France s'est transformée en « fin de la vente des voitures utilisant des énergies fossiles carbonées ».
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Le moteur thermique a-t-il encore un avenir ? Presque aussi vieux que l’automobile, il est de plus en plus menacé par la réglementation. En France, la loi d’orientation des mobilités (LOM) entendait même en interdire la vente dès 2040. Mais le texte voté en décembre 2019 a finalement adouci un peu son vocabulaire. Désormais, c’est une interdiction de la vente des voitures utilisant des énergies fossiles carbonées qui est mentionnée. Cela laisse un espoir aux défenseurs des biocarburants, qui auraient aussi l’avantage de pouvoir s’adapter plus facilement au parc existant. Jean-Luc Brossard, directeur de la recherche et du développement de la Plateforme automobile (PFA), rappelle en effet que le renouvellement de nos automobiles ne se fait que de manière très lente :
“« Chaque année, on ne vend que 6 à 7 % des voitures qui roulent. En 2030, il y a 5 % de chances pour qu’un modèle fabriqué en 2015 soit encore en circulation », précise-t-il dans une conférence organisée par l’Observatoire des experts de la mobilité (MAP).“
Le diesel condamné à court terme


Même en se concentrant sur les seules ventes de voitures neuves, le moteur thermique semble avoir encore son mot à dire. Dans l’hypothèse que l'organisme estime la plus réaliste, basée sur une forte réglementation environnementale mais une croissance économique assez faible, Jean-Luc Brossard ne prévoit en effet que 44 % de parts de marché pour les modèles 100 % électriques à batteries d’ici à 2040 en Europe. Les hybrides rechargeables représenteraient, eux, 27 % et la pile à combustible, 3 %. Il resterait donc encore près de 25 % pour les mécaniques carburant à l’essence, au gaz ou au gazole, même si elles devraient forcément être épaulées par un moteur électrique dès 2030. En revanche, les diverses restrictions de circulation risquent de rendre le diesel marginal dès 2025. En France, il ne pourrait plus faire que 2,1 % des ventes dès 2030. Sacrée déchéance pour celui qui avait atteint 72,9 % de part de marché en 2012 !
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Une vision plus globale des émissions

L’Hexagone semble aussi avoir de l’avance sur le 100 % électrique, qui pourrait atteindre 46,6 % dès le début de la prochaine décennie. Catherine Girard, expert leader en matières premières et énergie dans le groupe Renault, ne nie pas l’importance de développer ce type de motorisation pour arriver à la neutralité carbone souhaitée par l’Union européenne d'ici à 2050. Mais elle expose aussi le besoin de
“« communiquer de plus en plus sur une empreinte carbone totale, et non pas seulement sur les émissions de CO2 pendant le roulage. Aujourd’hui, quand on fabrique un véhicule électrique, un tiers des émissions est lié à la production de la batterie ».“
C’est dans cette optique que le Losange a commencé à convertir son usine de Flins, dans les Yvelines (Yvelines), en un site dédié à l’économie circulaire. Une façon de voir les choses qui commence tout juste à être envisagée par la réglementation puisqu'il faudra attendre 2026 pour qu’il devienne obligatoire de communiquer sur cet aspect.
La façon de produire l'électricité en question

La manière de générer l’électricité a aussi une importance cruciale. Si la France fait office de bon élève, avec seulement 48 grammes de CO2 par kilowattheure fabriqué, l’Allemagne, elle, est à 387 et la Pologne à 631 du fait des centrales à charbon. La moyenne européenne se situe ainsi à près de 269 grammes. On pourra certes arguer que la production, le raffinage et le transport du pétrole peuvent se montrer au moins aussi polluants, mais on est malgré tout loin du « zéro émission ». Enfin, Jean-Luc Brossard a aussi rappelé la nécessité d’avoir des infrastructures de recharge au niveau des besoins exprimés. Un défi auquel le Gouvernement français entend répondre en promettant l’installation de 100 000 bornes de recharge d’ici à fin 2021, mais nos différents tests nous ont plusieurs fois démontré que le réseau actuel était encore loin d'être assez dense aujourd'hui.