Jensen One. Quel est ce concept fou sur base de Citroën XM ?
Une réinterprétation très originale de la Citroën XM a vu le jour en 1992 : la Jensen One. L'argus revient sur l'histoire de ce prototype novateur et unique en son genre.
La Jensen One, réinterprétation très originale de la Citroën XM a vu le jour en 1992. L'argus revient sur ce cette auto singulière.
Jensen
Fruit d'une collaboration improbable entre le designer industriel danois Jacob Jensen, son fils Timothy Jacob Jensen et leur homologue Max René, la Jensen One est probablement la version la plus futuriste et la plus extravagante que la sage routière tricolore n'ait jamais connue. Le projet de ces trois esthètes était de concevoir une voiture absolument unique à partir d'un modèle existant. Nul ne sait pourquoi la Citroën XM dans sa version équipée du V6 3.0 24 soupapes de 177 ch a été choisie pour servir de base à ce projet original. Toujours est-il que cette étude de style qui a bel et bien vu le jour était également un concentré de technologie.
Carrosserie en fibre de carbone et en kevlar
Présentée le 27 août 1992 au Design Museum de Copenhague, ce prototype inaugurait alors la technique de la carrosserie en fibre carbone et kevlar. L'avantage de cet alliage de matériaux techniques résidait dans la rigidité accrue de la structure de l'auto, censée être cinq fois plus solide que l'acier et ce, sans le moindre surpoids.
Le design de cette XM se caractérisait par le carénage des quatre roues en hommage au dessin des Citroën DS, SM et CX dont les roues arrière étaient en grande partie masquées par leur carrosserie. Et ce carénage était justement amovible électriquement à l'avant et à l'arrière pour pouvoir accéder aux roues en cas de crevaison. Mais au-delà de l'inspiration puisée dans le dessin de ces aïeules, c'est la continuité de la ligne et la recherche d'aérodynamisme qui ont semble-t-il présidé à ce choix audacieux. A défaut d'être consensuel, ce design ultra travaillé procure une vraie singularité à la Jensen One qui semble non pas rouler mais littéralement voler sur la route.
Technologie à tous les étages
La Jensen One n'était pas qu'un délire de designer. Résolument avant-gardiste, cette routière aux allures d'OVNI était censée embarquer la technologie informatique la plus avancée de l'époque. Ses équipements étaient en tout cas en avance sur ce que proposaient alors les autos du début des années 1990. Les quatre sièges, l'accoudoir central et même les rétroviseurs étaient réglables électriquement avec plusieurs positions mémorisables. Plusieurs écrans digitaux étaient disposés dans le véhicule, notamment pour commander l'ouverture et la fermeture des carénages de roue.
Elle était aussi dotée d'un inédit système de mesure de distance électronique contrôlé par des lasers à l'avant et à l'arrière pour éviter les obstacles lors des manœuvres. Mais ce n'était pas tout puisque la Jensen One pouvait aussi se vanter d'être équipée de la fermeture automatique des vitres et du toit ouvrant commandée par ordinateur lors du départ du conducteur et, summum du luxe, d'une antenne intégrée dans les fenêtres pour capter la radio et les chaînes de télévision. Elle héritait enfin de la suspension hydraulique de la traditionnelle XM dont la cinématique au démarrage produisait toujours son petit effet.
Un prototype sans réel avenir
Initialement, cette Jensen One devait faire l'objet d'une production de 30 à 50 exemplaires par an au Danemark. Mais le projet s'est révélé financièrement irréalisable puisque la conversion de la XM V6 coûtait l'équivalent à l'époque de plus de 30 000 € HT auxquels il fallait naturellement ajouter 25 000 € environ pour l'acquisition de la XM servant de base à cette folle transformation. Résultat, cette XM très spéciale devait s'afficher au prix astronomique de 92 500 €, une somme parfaitement déraisonnable qui enterra le projet, faute d'investisseurs prêts à relever le pari de la production.
Le nombre d'exemplaires fabriqués fait d'ailleurs débat. La littérature qui la concerne évoque tantôt un, tantôt deux et même parfois quatre exemplaires au total dont on ignore ce qu'ils seraient devenus. Ce qui est certain, c'est que l'un d'entre eux, propriété de Jacob Jensen lui-même, a été vendu aux enchères à Hambourg le 3 novembre 2020 au prix de 30 000 € (36 000 € frais inclus). Le concessionnaire et collectionneur qui l'a acquise s'est dit prêt à investir les 6 000 à 7 000 € nécessaires pour la remettre en parfait état et ainsi perpétuer le mythe de cette étonnante auto.