Peugeot 306 S16. La première à passer la sixième
Née avec un moteur ACAV controversé, la 306 S16 a su ensuite faire l'unanimité avec l'arrivée de sa version 167 ch et d'une boîte six vitesses. De quoi en faire l'une des GTi Peugeot les plus prisées, même si elle n'avait déjà plus droit à ce label, aujourd'hui sur le point de disparaître à nouveau.
Après des débuts difficiles, la 306 S16 va vite se rattraper pour devenir l'une des GTI Peugeot les plus appréciées.
L'histoire se répète. Si, aujourd'hui, Peugeot s'apprête à abandonner le label GTI, certains se rappelleront peut-être que le Lion avait déjà fait ce choix dans les années 1990, du moins en France. Les trois lettres avaient acquis une réputation sulfureuse suite aux nombreux accidents rencontrés par des propriétaires de 205 et de 309 GTI, au point de faire office de repoussoir auprès des assureurs ! Tout en conservant ce nom sur de nombreux marchés, la marque avait donc préféré, dans l'Hexagone, opter pour de nouvelles appellations plus consensuelles.
Des débuts compliqués au retour en grâce


Comme sa petite sœur 106 avant elle, la 306 offre ainsi désormais le choix entre une XSI, déjà dynamique avec ses 123 ch, et la S16, qui se veut la vraie remplaçante de la 309 GTI 16. Hélas, malgré une ligne bien plus appréciée que celle de sa devancière, l'accueil est pour le moins mitigé lorsque cette version sportive débarque, en octobre 1993. Déjà handicapée par un poids en nette hausse, la nouvelle compacte Peugeot doit aussi composer avec un moteur deux-litres inédit qui n'affiche clairement pas la même santé que son prédécesseur. Sur le papier, la puissance est pourtant en progression par rapport à l'ancien 1.9 catalysé, en passant de 148 à 155 ch. Mais les journalistes et clients se demanderont bien où est cachée cette cavalerie... A tel point que Peugeot finira très vite par parler plutôt de 150 ch ! La réalité semble, elle, encore moins glorieuse si l'on en croit certains résultats de passage au banc...

Heureusement, la 306 S16 va réussir à se racheter trois ans plus tard, en octobre 1996. C'est en effet à cette date qu'elle adopte un nouveau moteur, débarrassé du controversé système ACAV (Admission à Caractéristique Accoustique Variable) qui était censé concilier couple à bas régime et puissance en haut du compte-tours. Cette fois, les 167 ch annoncés ne semblent pas être partiellement restés dans leur box, et la marque y ajoute même un atout alors inédit pour elle en série : une toute nouvelle boîte six rapports. "Elle avait été d'abord développée pour les 205 Groupe A en compétition", nous rappelle Eric Barthelat, du musée de l'Aventure Peugeot. "C'était une grosse évolution à l'époque, les boîtes six étaient encore rares, et les rapports bien rapprochés donnaient des sensations particulières."
La greffe a été effectuée un peu au forceps, si bien que cette version braque mieux à gauche qu'à droite : méfiance dans les parkings ! Mais dès qu'on s'éloigne des villes pour arriver sur route sinueuse, on retrouve un châssis qui avait d'emblée fait l'unanimité. Son essieu arrière autodirectionnel lui confère, en effet, une agilité redoutable, sa direction assistée n'a pas sacrifié la précision, alors que l'amortissement, remarquablement calibré, parvient à concilier confort et efficacité. L'opération contribuera ainsi à faire passer cette 306 S16 du statut de déception à celui de révélation, avant même qu'elle ne puisse profiter d'un restylage assez réussi, en avril 1997. Un parcours finalement pas si différent de celui de sa devancière 309 GTI, dont la version GTI 16 a fait littéralement oublier la "sage" variante 130 ch huit soupapes des débuts…
Peugeot 306 S16. Le tour du propriétaire

Prêté par son propriétaire Maxime F., l'exemplaire du jour n'est évidemment pas aussi neuf que la 604 GTI du musée de l'Aventure Peugeot, qui totalisait à peine 224 km. Mais dans sa robe jaune Vermeer assez peu courante, il n'a clairement pas à rougir de son état de conservation : difficile de croire qu'il a déjà parcouru plus de 126 000 km. Il est vrai aussi qu'il s'agit d'une version restylée, qui avait profité d'un sacré coup de jeune grâce à sa calandre affinée, ses phares aux angles adoucis, ses pare-chocs peints ou encore ses nouveaux feux arrière évoquant la grande sœur 406. Un traitement dont bénéficieront, au final, l'immense majorité des 306 dotées de la boîte six et du moteur 167 ch, puisque cette variante aujourd'hui plébiscitée est apparue juste avant ce lifting : si vous tombez sur une "phase 1", dont le look restait beaucoup plus proche d'une "grosse 205", vous avez donc déniché une vraie rareté.


Dans tous les cas, la présentation demeure très discrète, voire timide. Ici, pas de liseré rouge, d'ailes élargies ou encore d'aileron : quatre jantes 15 pouces, qui ont changé de dessin lors de l'arrivée de la 167 ch, un becquet à peine visible en haut de la lunette arrière et une petite lame en bas du pare-chocs font partie des signes distinctifs que seuls les connaisseurs sauront repérer. Cette sobriété, on la retrouve à bord. La moquette en authentique "peau de Schtroumpf" de la 309 GTI est rangée au musée des fantaisies dépassées : si vous n'aimez pas le noir et le gris, tant pis pour vous ! Avec ses touches de jaune sur les sièges cuir-tissu assorties à la teinte extérieure, l'intérieur "Mustang" du jour vient toutefois apporter une touche de gaieté, alors que la console centrale de cette phase 2 s'offre un placage façon aluminium, à la manière de l'Alfa Romeo 159.

Notez aussi que la gamme S16 se divise en deux finitions à compter de novembre 1997 : avec son autoradio RDS à commandes au volant, sa climatisation ou ses vitres électriques, la version Premium de Maxime est autrement mieux équipée que la mal nommée Confort, plus dépouillée afin d'attirer les budgets plus serrés…et ceux qui souhaitent s'engager en compétition sans opérer trop de modifications. Outre-Manche, celle-ci servira d'ailleurs de base à une 306 Rallye, une série limitée à 500 exemplaires qui oublie la discrétion en reprenant la décoration des 205 et 106 Rallye. Un collector en puissance si vous n'êtes pas allergique aux volants placés du mauvais côté.

Les rivales de l'époque
Comme (presque) toujours, Peugeot trouve forcément Renault en travers de sa route. Mais la R19 16S, vendue entre 1990 et 1996, souffre des mêmes tares que la 306 S16 ACAV, avec un 1.8 de 140 ch au tempérament et aux performances jugées trop placides, et elle ne saura pas corriger le tir. Quant à la Mégane 1 Coupé, même en adoptant le deux litres de 150 ch qu'on retrouvera ensuite dans le Spider, elle ne joue pas totalement la carte du sport : il faudra attendre la deuxième génération, en 2004, pour voir débouler le label R.S. Finalement, la concurrence la plus féroce se trouve donc dans le même groupe, chez Citroën, où la ZX 16v, puis la Xsara VTS auront droit au "XU10J4RS", le fameux deux litres de 167 ch. Malgré leur boîte à "seulement" cinq rapports et leur physique moins apprécié, ce sont deux bonnes alternatives à la 306 S16 BV6, grâce à leur cote plus raisonnable et à leur comportement également très agile : elles profitent aussi du même train arrière autodirectionnel.
De l'autre côté du Rhin, la Golf GTI est toujours là, mais pas au mieux de sa forme : prise de poids et tempérament assagi ne font pas de sa troisième génération la plus inoubliable de la lignée, même dans sa version 16V de 150 ch. L'atypique VR6 de 174 ch joue, elle, plutôt la carte du grand tourisme en petit format. L'Opel Astra GSI brille pour sa part davantage par ses pétillants moteurs, en particulier le 2.0 16 soupapes de 150 ch, que par son châssis très brouillon, alors que la Ford Escort RS 2000 est également aux antipodes de la 306 dans ce domaine. Mais la concurrence, plus ou moins directe, vient aussi d'Italie, avec l'Alfa Romeo 145 QV et la Fiat Bravo HGT, animée par un atypique cinq-cylindres, ou encore du Japon, grâce à une Honda Civic 1.6 VTi adepte de régimes moteur himalayens. Des alternatives aujourd'hui bien moins répandues que la Lionne en France.
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Les grandes dates de la 306 S16
- Octobre 1993 : lancement de la 306 S16, en trois et cinq-portes. Son deux litres, connu sous le surnom "ACAV" en raison de son système d'admission variable, est alors donné pour 155 ch.
- Novembre 1993 : Une série limitée à 400 exemplaires Le Mans habillée de rouge et ornée de logos spécifiques sort dans la foulée, pour fêter les succès de la 905 dans la Sarthe.
- Juillet 1994 : Discrètement, Peugeot descend la puissance officielle à 150 ch alors que le Lion de la calandre grandit et qu'une poignée est ajoutée sur le hayon.
Durant les premières années, une version cinq-portes a existé.
- Octobre 1996 : Le moteur de la 306 S16 est totalement remanié. Débarrassé du système ACAV, il gagne en caractère et grimpe à 167 ch. Autre progrès, il est désormais associé à la première boîte manuelle six rapports de l'histoire de Peugeot. Seuls signes distinctifs de cette nouveauté à l'extérieur : des jantes qui troquent le dessin "Laser" contre le "Cyclone" et des répétiteurs de clignotants sur les ailes avant. En revanche, la cinq portes disparaît.
- Avril 1997 : comme toute la gamme, la S16 est restylée. De nouveaux phares en amande, une calandre réduite à une seule fente, des feux arrière redessinés ou encore des pare-chocs peints modernisent sa silhouette en l'éloignant de la 205, alors que l'airbag passager devient de série.
La Brigade Rapide d'Intervention (BRI) de la gendarmerie va aussi adopter la 306 S16, dans sa version 167 ch qui plus est. - Mars 1998 : la gamme évolue et se dédouble. Une finition Confort, assez dépouillée malgré son nom, permet de faire baisser le tarif d'accès de 24 000 Frs, tandis que la Premium reprend l'équipement proposé jusqu'ici.
- Mai 1999 : Deuxième restylage pour la 306, nettement plus discret que le précédent puisqu'il se résume à des glaces lisses pour les phares, des répétiteurs de clignotants blancs ou encore des baguettes plus fines et couleur carrosserie.
- Juin 2001 : Fin de production pour la 306 S16. Elle n'aura pas de remplaçante directe dans la gamme 307, malgré la présence d'un 2.0 de 180 ch sous le capot.
Conseils d'achat et points à surveiller

Même si le moteur "ACAV" des débuts est bien moins prisé que son successeur, les deux partagent au moins une qualité : à condition d'avoir été entretenus avec suffisamment de soin, ils sont extrêmement robustes. Seul le système ACAV justement, peut venir perturber le fonctionnement sur les premières versions. Ses "poumons" tendent en effet à se percer avec le temps et ne jouent alors plus leur rôle. Pas grand-chose à signaler du côté des boîtes de vitesses, qu'elles comptent cinq ou six rapports. En revanche, malgré ses inspirations germaniques, l'habitacle ne traverse pas toujours aussi bien les années : les panneaux de portes en velours finissent souvent pas se décoller et la sellerie en Alcantara optionnelle est fragile.
Fiabilité. Une Peugeot 306 HDI dépasse les 666 000 km.


Du côté des portières, il est aussi fréquent de voir le faisceau des vitres électriques et de la condamnation centralisée se couper. Le témoin d'airbag peut aussi rester allumé et, comme sur la plupart des Peugeot de cette période, le train arrière est à surveiller. Un mauvais réglage du carrossage, et l'effet autodirectionnel peut s'accentuer jusqu'à en devenir piégeux... Quant à la rouille, si elle ne fait pas autant de ravages que dans les années 1980, la méfiance reste de mise : Maxime préconise de surveiller particulièrement le passage de roue arrière gauche sur les versions qui se passaient de pare-boue à cet endroit ainsi que le bas des longerons avant, sous la caisse juste derrière le berceau moteur. Eric Barthelat confirme d'ailleurs ce conseil, notamment pour les exemplaires qui ont connu des hivers assez rudes en étant garés à l'extérieur.
Les chiffres-clés
- Production : 1993-2001
- Usine : Poissy
- Nombre d'exemplaires : 26 000 environ, versions ACAV et 167 ch confondues


Comme vous pouvez vous en douter à la lecture de cet article, la cote est totalement différente entre les premiers modèles "ACAV", toujours assez boudés, et les versions 167 ch BV6, qui sont déjà très recherchées... même si elles semblent finalement plus répandues. Les premières se dénichent ainsi dès 3 000 €, avec beaucoup de kilomètres et de travaux à prévoir, et n'excèdent guère les 6-7 000 €, y compris pour la série limitée Le Mans un peu plus demandée. Pour les deuxièmes, en revanche,
“"La fourchette varie déjà entre 9 000 et 13-14 000 € pour une version extrêmement bien conservée, sans tuning et pas trop bricolée comme celle-ci", d'après Eric Barthelat.“
Des montants déjà élevés et qui ne semblent pas être partis pour baisser : même si elle ne porte plus les trois fameuses lettres en France, cette S16 167 ch est bien l'une des dernières GTI Peugeot à moteur atmosphérique et l'une des plus appréciées.

La 306 s'est aussi illustrée en compétition, y compris à haut niveau avec la fantastique Maxi.
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Largus.fr remercie chaleureusement Maxime F. du 306 S16/XSi Club de France et du Club 306 pour sa précieuse connaissance du modèle, L’Aventure Peugeot Citroën DS et le Musée Peugeot de Sochaux (Christian Guillaume & Eric Barthelat).