Carter-Cash, à contre-courant dans l'après-vente automobile
Produit maison Mobivia, Carter-Cash s'est forgé en s'inspirant de ses cousins Norauto et Midas. Mais l'enseigne axe sa stratégie sur ce que ces réseaux ne font pas : de la distribution après-vente low cost. 20 ans après sa création, elle compte 84 magasins et ne veut surtout pas "s'embourgeoiser".
Le réseau Carter-Cash comptait, à fin mars 2022, 84 magasins dont 73 en France et 6 en Espagne, 4 en Italie et 1 au Maroc
Justine Pérou
« Pour rappel, nous sommes low cost. Allons à l’essentiel. Soyons astucieux. Faisons toujours bien du premier coup. Et à moindre coût ». Un petit mot affiché dans le local des employés d’un magasin Carter-Cash à Wattignies, près de Lille, rappelle l’ADN de l’enseigne créée sous la coupe de Mobivia, il y a 20 ans. À l’époque, alors que le groupe construit son écosystème autour de l’entretien et de la réparation avec les réseaux de centres-autos Norauto et Midas, le grand patron Eric Derville soutenait Patrick Lefebvre, l’un de ses plus proches collaborateurs, dans l’idée d’aborder différemment le secteur automobile français, soit à l’encontre de la tendance générale. La création d’une enseigne spécialisée dans la distribution de pièces détachées, pneus, huile, batterie et d’accessoires low cost était pour eux alors inévitable pour être le concurrent de tout le monde et de personne à la fois. Dans une lettre adressée aux équipes, le duo décrivait le concept de la façon suivante : « Les produits seront différents et les prix plus agressifs, les services d’atelier beaucoup plus réduits, le service à la vente très limité, un merchandising sobre, pratique et peu coûteux. La clientèle visée est le bricoleur, le mécanicien, les jeunes, en recherche de prix, de choix et de praticité ». Un peu à la sauce hard discount que l’on connaît du côté de Brico Dépôt et de Lidl.

Consolider le modèle Carter-Cash
Profitant d’un ex-site Norauto, le fondateur a eu carte blanche, il a ouvert un 1er magasin à Sainte-Geneviève-des-Bois (Essonne) en 2002. Il ne fallait surtout pas reprendre les codes de ses cousins Norauto ou encore Midas, mais bien optimiser les coûts dans l’immobilier, la communication, de présentation dans les surfaces de vente, etc, pour toujours proposer des produits, accessoires et services à prix bas.

Encore aujourd’hui, les magasins Carter-Cash s’implantent dans d’anciennes friches en zones industrielles pour être visibles et accessibles au plus grand nombre ; la décoration est inexistante jusqu’à garder les sols en béton, les rayons s’animent à coup de palettes en bois, cartons et bacs plastiques, et les affichages placardés partout attirent l’œil par leur couleur jaune fluo ! À chaque magasin son atelier : la surface dédiée au montage des pneus ou à la vidange se veut minimaliste. Les salariés ont le statut de vendeur-monteur et jonglent entre l’activité commerciale et les prestations ateliers. « La première étape a été de valider le concept et l’offre client, trouver les équilibres économiques et organisationnels, véhiculer le message du low cost, car ce n’est pas quelque chose d’inné chez nos collaborateurs, ni chez les consommateurs. On vend une batterie en 15 secondes car nous n’avons qu’une offre. Il n’y a pas d’argumentaire entre un premier prix, une MDD ou une grande marque. Il a donc fallu créer tous les process, les rendre “duplicables” à tous les magasins, caler les méthodes et outils de formation, de communication, travailler la centralisation, pour permettre d’avoir un modèle efficient unique », souligne Thierry Deuzé, directeur général de Carter-cash international.
Se développer à l’international
Pendant une dizaine d’années, les ouvertures de magasins de l’enseigne discount se sont réalisées par cycle avec des phases d’accélération, jusqu’à atteindre un maillage de 35 points de vente en France en 2014. Puisque le concept est rentable depuis 2010, la question du développement international se pose. Trois ans plus tard, un premier magasin espagnol ouvre ainsi qu’un site italien. En 2022, le réseau compte au total 84 sites, dont 73 en France (et 800 collaborateurs), 6 en Espagne, 4 en Italie et 1 au Maroc. L’entreprise se développe qu’en succursales et ne compte pas s’ouvrir à la franchise. « Nous sommes un produit maison Mobivia, et sous la coupe d’un grand groupe, c’est plus facile. Nous connaissons les marchés que nous adressons grâce à Norauto. Nous ne faisons pas le même métier, mais son histoire nous a été très profitable », affirme le dirigeant.

Carter-Cash, à l'heure de la transformation digitale
À partir de 2014, outre le développement de son réseau physique, Carter-Cash a pris le parti d’avancer aussi sur le Web. Elle crée son premier site marchand en 2012. Après la réservation en ligne, le click and collect, Carter Cash se lance dans la livraison à domicile en 2019 et rachète deux ans plus tard 100 % des actifs de la société d’e-commerce de pièces détachées Yakarouler.com. Une opportunité d’accélérer la transformation digitale et de multiplier son offre par 10 : si elle s’appuie sur un catalogue national de 80 000 références, l’acquisition lui permet d’accéder à 700 000 références de pièces
d’affectation supplémentaires et centralisées via une plate-forme logistique. « Tout reste encore à faire en matière de synergies et d’organisation, nous allons capitaliser sur l’existant pour apprendre sur le digital. Il s’agit pour nous d’un gros relais de croissance, assure Thierry Deuzé. L’histoire va continuer et l’enseigne ne dérogera pas à ses principes, surtout en période de crise. Le patron confirme que le chiffre d’affaires a été maintenu pendant la pandémie et qu’il est aujourd’hui en croissance de plus de 10 %. « Nous sommes de plus en plus en adéquation avec notre différence commerciale. C’est tellement facile de s’embourgeoiser. Nous ne changerons pas, mais le combat du low cost est permanent. Notre culture est de ne pas faire comme les autres ».
Carter-Cash en chiffres
- 84 magasins
- 4 pays marchés
- 850 collaborateurs en France et 73 magasins
- Chiffre d'affaires en croissance de plus de 10 %
- L’atelier : 5 à 6 % du CA / âge moyen des véhicules réparés : 11 ans.
- La vente en ligne : 10 % du CA
- Dépasser la barre des 100 magasins dans les 2 ans