Covid-19 : entretien avec le patron de Wyz Group
Pierre Guirard, fondateur de Wyz, spécialiste de la vente et de la gestion du pneu en ligne pour les professionnels, s'est confié sur l'impact de la crise sanitaire sur son entreprise et sur les dispositions envisagées quant à un plan de reprise. Verbatim.
Pierre Guirard, président de Wy Group
Le président cofondateur de Wyz Group, partenaire notamment des principaux constructeurs pour la distribution de pneumatiques, a organisé une visioconférence avec la presse spécialisée automobile, le lundi 20 avril 2020, dans le but de faire un point sur l’engagement de son entreprise pendant cette période exceptionnelle, mais aussi d’évoquer l’impact de l’épidémie de Covid-19 sur son activité. Pierre Guirard a même enregistré une journée à seulement neuf pneus vendus ! Voici quelques extraits de la discussion organisée sur Teams.
Plan business en perte de vitesse
« Le premier point à savoir et à noter est que nous avions réalisé un très bon début d’année 2020 avec une croissance de notre chiffre d’affaires de 25% à fin février. Mais à l’annonce du confinement lié au Covid-19 et de la fermeture de tous les commerces non-essentiels (mi-mars), nous savions que la chute serait brutale. En effet, le lundi suivant nous avions immédiatement enregistré une baisse de notre chiffre d’affaires de 40%, et le mardi de l’ordre de 96%. C’est-à-dire que nous tournions qu’à 4% de notre activité, ce qui s’avérait être notre rythme financier de croisière jusqu’à aujourd’hui. Nous remarquons tout de même à la mi-avril que ce chiffre remonte progressivement avec un CA atteignant 12% et cette croissance est liée à la réouverture au fur et à mesure des ateliers. Cela fait du bien ».
« Compiègne, cœur de l’ouragan »

« Notre siège est basé à Compiègne dans l’Oise, le cœur de l’ouragan. Un ami médecin m’a tout de suite prévenu dès le début de mois de février qu’il craignait une pandémie. Rappelons que pour nous, cette crise a commencé très tôt avec un premier décès lié au Covid-19 le 26 février à l'hôpital de Compiègne, qui se trouve à 200 mètres de notre entreprise. Nous avons pris les choses au sérieux et avons décidé de mettre l’entreprise immédiatement en télétravail. Nous avons ainsi passé trois semaines sans grande difficulté. Puis, nous avons basculé qu'à un tiers des ventes dès le 16 mars, et ainsi de suite. Aujourd’hui, 25% de nos effectifs sont au chômage partiel, 25% à mi-temps et 50% des collaborateurs continuent en télétravail.
Aussi, côté liquidités, nous avions tout de suite les idées claires concernant notre situation et avons rapidement contacté nos partenaires banquiers. Nous avons une trésorerie saine mais entre le confinement et une possible reprise d’activité, nous avons aussi prévu d'éventuels retards de paiement et donc anticipé une ligne de crédit supplémentaire auprès des banques. En résumé, nous pouvons tenir trois mois et sommes capables de passer cette épreuve aussi sereinement que l’on peut malgré tout. Malheureusement, nous sommes conscients que notre objectif de passer cette année d’un statut de PME à ETI, avec plus de 50 millions de chiffre d’affaires, ne sera pas possible. Nous allons sûrement se caler sur un résultat comparable à celui de 2019. Dans notre plan, nous prévoyons un retour en force en septembre ».
« La gestion post-crise va être intense »
« Nous pensons à un redémarrage à la mi-mai même si l’on s’attend à une situation chaotique. Nous n’avons aucune appréhension pour les fournisseurs car ils ont toujours tenu le flux. Je pense vraiment qu’ils seront prêts pour la reprise mais j’appréhende davantage cette transition entre tous les acteurs finalement. Le redémarrage va être très long pour tout le monde et nous pouvons très bien imaginer des ruptures dans la chaîne. La gestion post-crise va être intense mais nous parviendrons à retrouver notre place à tous.
Nous nous interrogeons également concernant le retour de la totalité de nos équipes alors que notre activité n’aura pas repris à 100%. La question est de savoir comment nous allons manager pendant cette période, même si c’est presque accessoire ».
Prise de conscience générale
« Nous allons tirer des leçons de cette pandémie. Par exemple, d’un point de vue écologique, nous allons revoir nos mauvaises habitudes et privilégier le télétravail qui peut être un très bon complément ou encore devenir un peu plus raisonnable sur nos déplacements. Le rapport entre les salariés et l'entreprise va également évoluer dans le bon sens, il y aura une forme d’attachement car tout le monde se sera serré les coudes. Nous devons désormais maintenir le lien avec tout le monde, pour que chacun soit au courant de ce qu’il se passe. Nous allons apprendre de cette expérience inédite, nous serons plus vigilants, plus responsables. Une prise de conscience va s’opérer quant à l’industrialisation et la relocalisation, j’en suis persuadé. Aussi, si on fait l’analyse de ces dernières semaines, j’estime que l’Etat a été extrêmement présent pour les entreprises avec de bonnes mesures économiques. Tout n’a pas été parfait évidemment mais le fait de ne pas rompre la chaîne entre les fournisseurs et les clients a été une grande décision. C’est un énorme message. Sur la partie bancaire et le travail, le gouvernement a agi vite et bien, le problème c’est qu’il n’est pas totalement suivi pas les banques, c’est dommage ».