Fin du thermique en 2035. « Un sabordage industriel » pour Luc Chatel
Le vote du Parlement européen pour l'interdiction de la vente de voitures neuves à moteur thermique en 2035 nécessite encore la validation des États membres, mais les réactions sont déjà très contrastées : « un pas en avant significatif » pour les uns, « un sabordage industriel » pour les autres.
Le président de la PFA estime que l'interdiction de la vente de voitures neuve à moteur essence, diesel ou hybride en Europe va laisser un boulevard pour l'industrie chinoise
DR
Le mercredi 8 juin 2022, le Parlement européen a voté en faveur de l’interdiction de la vente de véhicules thermiques neufs à partir de 2035, en fermant la porte à toute alternative à d’autres technologies que l’électrique à batterie et la pile à combustible fonctionnant à l’hydrogène. Cette décision n’est pas encore définitive, puisqu’elle doit encore être adoptée par les États membres. Mais les réactions se veulent déjà très contrastées.
Sans surprise, le lobby écologiste Transport & Environnement, qui soutient cette mesure, évoque « un pas en avant significatif pour l’action climatique, la qualité de l’air et l’abordabilité des véhicules électriques ». Il appelle également les ministres européens de l’Environnement à « confirmer la date effective de fin des ventes de nouveaux moteurs à combustion » lorsqu’ils se réuniront le 28 juin. Alex Keynes, responsable des véhicules propres chez Transport & Environnement, note également que cette décision est une « opportunité historique » pour « mettre fin à notre dépendance au pétrole », tout en donnant « la certitude dont l’industrie automobile a besoin pour augmenter la production de véhicules électriques, ce qui fera baisser les prix pour les conducteurs ».
À LIRE. Interdiction du thermique en 2035. La PFA tire la sonnette d'alarme
Tenir compte des « incertitudes » de l’industrie automobile

L’ACEA estime également que ces objectifs « extrêmement ambitieux » ne pourront être atteints qu’avec une « montée en puissance massive des infrastructures de recharge ». Et face à « l’incertitude » au niveau mondial, Oliver Zipse, directeur général de l’ACEA, recommande « un examen transparent » à mi-chemin qui permettra de « définir les objectifs post-2030 » car « toute réglementation à long terme allant au-delà de cette décennie est prématurée à ce stade ».
À LIRE. Les propositions de la PFA face aux défis de l'industrie automobile
1 million de bornes de recharge d’ici 2030
Interrogé ce jeudi matin sur BFM Business, Luc Chatel, président de la Plateforme automobile (PFA), s’est quant à lui montré plus alarmiste. Reconnaissant que « le virage électrique est une nécessité » que l’industrie a commencé à mettre en oeuvre en multipliant « par dix en quatre ans » la part de marché des véhicules électriques, le représentant de la filière automobile française estime que « l’interdiction du thermique, c’est un un grand saut dans le vide et un sabordage industriel ».Luc Chatel s'inquiète ainsi du pouvoir d’achat des automobilistes et rappelle les difficultés actuelles du marché :« Je ne sais pas si on aura les clients pour ces voitures électriques », qui coûtent « 50 % plus cher qu’une voiture thermique ». Ceci alors qu’« on a déjà du mal à vendre nos voitures aujourd’hui », dit-il. Pire, les Français pourraient « garder et acheter des véhicules anciens », faute de pouvoir s’offrir des modèles neufs.En parallèle, il estime que « pour avoir un débit suffisant lors des week-ends de grands départs, il faudrait environ 70 bornes ultra rapides par station service » à terme. Au lieu des 60 000 bornes de recharge publiques installées en France aujourd’hui, il indique qu’il en faudrait environ 1 million d’ici 2030 pour tenir le rythme imposé par l’UE. Le porte-parole évoque également la question de la fourniture d’électricité décarbonée en quantité suffisante, alors que les nouveaux EPR ne seront pas en service d’ici 2035, ainsi que l’impact environnemental de l’ensemble du cycle de vie d’une voiture électrique.
À LIRE. Guerre en Ukraine. 2,6 millions de voitures non produites en 2022
« Un boulevard pour l’industrie chinoise »

Rappelant que « le président de la République a soutenu la position de la filière française », qui souhaite une clause de revoyure en 2028, il souhaite que la législation qui sera retenue définitivement laissera la porte ouverte à d’autres technologies que le tout-électrique.