Location de courte durée. La difficile percée des voitures électriques
Les loueurs de courte durée continuent d'incorporer des voitures 100 % électriques dans leur flotte mais ces modèles ne suscitent qu'un intérêt limité de la part des clients. La profession a mis sur la table plusieurs mesures destinées à stimuler la demande.
Le taux d'utilisation d'un véhicule électrique chez les loueurs de courte durée n'affiche que 38 % actuellement.
Engagés dans la transition écologique des mobilités, les loueurs de courte durée ont « verdi » leurs flottes en intégrant des véhicules équipés de motorisations hybrides, hybrides rechargeables et électriques. À l’image du renversement du mix énergétique observé sur le marché automobile, les modèles électrifiés, qui pèsent en moyenne 26 % de la flotte des loueurs, sont davantage représentés que les diesels. L’essence domine encore nettement en équipant en moyenne une voiture de location sur deux. Sur une flotte d’environ 200 000 véhicules à louer en France, les produits électrifiés représentent autour de 50 000 unités et les 100 % électriques entre 5 000 et 7 000. La branche des métiers de la mobilité partagée du CNPA avance que le parc automobile des grandes enseignes internationales de la LCD, âgé de moins d’un an, émet en moyenne 12 g/km de CO2 de moins par rapport au parc moyen français (qui dépasse les 10 ans). « Les loueurs de courte durée ont multiplié par 2 les achats de véhicules électriques en 2021, par 3,5 ceux de véhicules hybrides et par 7 les achats d’hybrides rechargeables. Les taux de croissance dans notre secteur sont supérieurs aux moyennes du marché », détaille Jean-Philippe Doyen, président du métier de la mobilité partagée au sein du CNPA et de l’enseigne Sixt pour la France, l’Italie et Monaco.
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Des voitures électriques trop peu utilisées
L’électrification est bien en marche chez les acteurs de la location. Mais la demande des clients sur les voitures 100 % électriques est encore loin d’être au rendez-vous. Ainsi, la branche rapporte que le taux d’utilisation du véhicule électrique (38 % ; soit 12 jours sur un mois) est presque de moitié inférieur au taux d’utilisation du véhicule thermique (72 %). Une bonne partie du temps, les modèles 100% électriques qui composent la flotte ne sont donc pas loués. Selon les représentants des principales enseignes du marché, le frein n’est pas financier. Fabrice Gueudet, qui exploite 30 agences Avis, estime que le prix facial de la location d’une voiture électrique coûte en moyenne 10 à 15 % plus cher que celle d’un modèle thermique équivalent. « En revanche, cela revient moins cher à l’usage pour le client en raison des économies de carburant », précise le dirigeant. « Même à prix équivalent entre un électrique et un thermique, la demande n’est pas plus importante », appuie Gregory Vandenbroucke, directeur réseau et infrastructures chez Hertz France. Et de relever que « dans 90 % des cas, les VE sont loués au comptoir des agences et non dans le cadre d’une réservation en ligne ».Un modèle économique qui reste à trouver

La branche du métier de la mobilité partagée rappelle que les sociétés opérant plus de 100 véhicules, et qui sont clientes des services de location de courte durée, ont désormais l’obligation de disposer de 10 % de véhicules à faibles émissions dans leur flotte en 2022, une part qui passera à 40 % en 2027 et à 70 % en 2030. « En l’état actuel des choses, nous n’atteindrons pas ces 70 %, mais tout le monde en a conscience, l’État en premier lieu », indique Jean-Philippe Doyen. Les loueurs de courte durée, qui pèsent en moyenne entre 10 et 12 % des immatriculations VN en France, ne représentent à ce jour qu’environ 4 % des immatriculations de véhicules 100 % électriques, soit un peu plus de 4 000 unités au cumul des neuf premiers mois. Les constructeurs automobiles ont besoin de ce canal pour écouler leurs modèles électrifiés et ainsi respecter les objectifs Cafe.
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Une activité encore en net retrait
Le verdissement de la flotte intervient donc dans un contexte compliqué pour les enseignes de location. La branche des loueurs du CNPA rapporte que l’activité accuse une baisse de 30 à 35 % en septembre par rapport à la période pré-Covid. Celle-ci affichait – 50 % en juin dernier. Les pertes se concentrent principalement au sein des aéroports, en raison de l’absence de la clientèle internationale, tandis que celle liée au « voyages d’affaires » repart progressivement. Afin de stimuler l’attractivité et la demande en matière d’électromobilité des consommateurs mais aussi de lever les freins opérationnels qui existent, les professionnels de la location de courte durée proposent plusieurs mesures.- Soutenir la demande des entreprises avec une mesure à zéro euro. « Il est urgent que les entreprises qui sont concernées par l’obligation de verdissement des flottes de plus de 100 véhicules telle que mise en place par la loi LOM, et qui sont clientes des services de location de courte durée, puissent intégrer à leur reporting les véhicules électriques qu’elles louent en courte durée ».
- Faire progresser, chez les Français, l’attractivité des véhicules électriques, via la mise en place d’un chèque « location électrique », ciblé uniquement sur les véhicules électriques et hybrides. « Ce chèque, exonéré de charges sociales et qui pourrait offrir la possibilité d’être déduit directement de la facture de location, est un outil simple et visible qui répond pleinement à l’ambition portée par la loi LOM en matière de mobilité durable du quotidien ».
- Accélérer le déploiement des bornes de recharge, frein opérationnel majeur au développement du véhicule électrique, dans les agences de location et les entreprises des services de l’automobile, qui maillent l’ensemble du territoire français.
- Maintenir les aides à l’achat à un niveau suffisant. Les loueurs plaident pour le rétablissement d’un bonus à 5 000 € pour les entreprises, alors que les montants ont été réduits au 1er juillet (4 000 euros), et qu’ils suivront une trajectoire progressive de baisse en 2022.
- Intégrer davantage la location aux politiques de mobilité, à l’image de la commande publique. « En France, le pilotage de la dépense publique locale favorise l’achat de véhicules, considéré comme un investissement, au détriment de la location, considérée comme une dépense de fonctionnement. C’est pourquoi, le CNPA a proposé dans le cadre du Projet de loi de Finances 2022 un élargissement du Fonds de compensation pour la TVA (FCTVA) à la location, afin de donner de la flexibilité aux collectivités et les encourager à faire également le choix de la location de véhicules, dans une logique d’usage et d’économie circulaire ».