Marc Lechantre (PSA) : "scruter le pricing des occasions électriques"
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Marc Lechantre (PSA) : "scruter le pricing des occasions électriques"

La résistance du marché de l'occasion a été l'un des enseignements de la fin d'année 2020. Marc Lechantre, le directeur de la business unit VO de PSA, décrypte les tendances observées ces derniers mois et évoque les projets du groupe sur ce business, en France et à l'international.

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Marc Lechantre, directeur business unit véhicules d'occasion de PSA

L'argus.Le marché de l’occasion résiste beaucoup mieux que celui du neuf. Quelle lecture faites-vous de cette tendance ?
Marc Lechantre, directeur business unit véhicules d’occasion de PSA. La situation du marché de l’occasion est meilleure que celle du neuf presque partout en Europe. Le marché ayant été très perturbé en 2020, cela invite à une certaine prudence et humilité dans les commentaires. En France, nous avons connu une période de juin à septembre où l’ensemble des catégories d’âge du marché de l’occasion étaient reparties à la hausse, avec une croissance plus marquée pour les VO âgés. C’était un peu moins le cas en octobre et novembre, en raison notamment d’une moindre dynamique de l’offre d’occasions récentes.

Pourquoi observe-t-on une meilleure résistance du marché de la seconde main ?
D’abord parce que le cycle d’achat est plus rapide : le véhicule est disponible et répond à un besoin immédiat. Par nature, et pour des questions de revenus, le marché de l’occasion s’adresse aussi à davantage de personnes que celui du neuf. Enfin, cette crise sanitaire a révélé un retour de la recherche d’une mobilité individuelle au détriment des solutions de transport en commun. Or, quand vous êtes confrontés à ce besoin, rapidement et avec des moyens réduits, le VO constitue une réponse adaptée.

Certains professionnels déploraient ces derniers mois des stocks sous tension sur le VO récent. Est-ce toujours le cas ?
Au début de chaque crise économique, la crainte de tous les acteurs de l’automobile est de se retrouver avec un stock de véhicules sur les bras et de subir une double sanction sur les prix de revente. Nous ne sommes pas dans cette situation, mais dans celle où les stocks des constructeurs – en tout cas chez PSA – et ceux des distributeurs sont plutôt sains, voire en tension sur certaines marques et certains modèles. C’est préférable à une situation de sur-stock, car cela a permis aux prix et aux valeurs résiduelles de très bien se tenir sur toute la période, en France comme en Europe. Je conviens que ce n’est pas simple tous les jours pour les professionnels qui cherchent à s’approvisionner actuellement, mais le distributeur qui se plaignait de ne pas avoir assez de « sourcing » en octobre n’était plus vraiment demandeur de voitures avec l’arrivée du second confinement.

Aux couleurs de Spoticar

La crise sanitaire a-t-elle freiné, reporté ou même arrêté certains projets et développements ?
Elle a d’abord accéléré certaines choses, notamment la digitalisation des parcours de vente. Nous avons par exemple lancé récemment en France et en Espagne la réservation en ligne sur le site spoticar.fr. Nous mettons en place le service de livraisons à domicile. Aujourd’hui, cette option représente 20 % des ventes chez Aramis Auto, contre 10 % avant la crise sanitaire. En revanche, et objectivement, nous avons été obligés d’adapter le développement du label Spoticar au contexte. Nous avons entrepris, par exemple, des campagnes marketing en France, en Espagne, en Italie, au Portugal, mais celles prévues en Allemagne, aux Pays-Bas ou en Belgique ont été décalées à 2021. Le programme sortira au premier semestre dans ces pays. La transformation physique des réseaux s’est aussi révélée plus compliquée, car les confinements n’ont pas permis d’avancer sur les travaux, d’obtenir les autorisations des mairies ou de mobiliser le cash nécessaire pour mener ce type d’opération. Notre ambition est de rattraper ce retard, et la totalité du réseau PSA en France sera aux couleurs de Spoticar à la fin du premier semestre. Plus de 150 sites ont déjà adopté la nouvelle image.

Spoticar condamne-t-il les labels multimarques indépendants développés par les groupes ?
Nous ne faisons la guerre à personne. Aujourd’hui, tous nos concessionnaires sont partants pour adhérer à Spoticar. Pour les opérateurs qui ont développé un programme petit prix, aucun problème : c’est complémentaire de l’offre de Spoticar, qui propose des voitures âgées de moins de 8 ans. Quant aux groupes qui ont déjà un label un peu identique, à eux d’analyser leurs investissements marketing pour déterminer s’il est opportun de développer les deux, sachant que leur label sera moins puissant et moins visible. Il faut savoir qu’à fin octobre 2020, dans nos dix principaux pays en Europe, et malgré la crise sanitaire, le trafic était en hausse de plus de 55 % par rapport à l’an passé. Cette progression sera encore plus forte en 2021.

Les premières voitures électriques d'occasion

La poussée des voitures électrifiées est-elle aussi perceptible en occasion ?
Nous commençons à voir arriver en occasion les premières électriques de nouvelle génération, c’est-à-dire des e-208, des Corsa-e, ainsi que certains modèles hybrides rechargeables récents. Mais cela reste très embryonnaire. Le marché est naissant, et il est encore tôt pour en tirer des conclusions. Pour autant, nous scrutons avec beaucoup d’attention le pricing de ces produits car il faut absolument que nous ayons de la visibilité sur les aides publiques concernant les véhicules électrifiés. Ce sera le cas pour les deux prochaines années, et c’est extrêmement positif. Si les incentives sur le véhicule neuf bougent tout le temps, c’est compliqué pour les clients de s’y retrouver et pour nous de tarifer correctement les véhicules d'occasion. Dans les six mois qui viennent, le marché commencera à mieux se réguler.

Vous avez transféré votre activité de reconditionnement à Hordain l’an passé. Que représente ce site en termes de volume ?
Nous avons 15 000 places de stockage et une chaîne de reconditionnement au meilleur standard, dont la capacité est de 100 véhicules par jour. Le site d’Hordain est notre principal parc de stockage de voitures d’occasion en France, et le développement d’autres sites est à l’étude.

Développement à l'international

Pourriez-vous devenir un acteur du remarketing VO et opérer pour le compte d’autres acteurs ?
Nous pensons que la maîtrise de la compétence de reconditionnement des véhicules d’occasion fait partie des fondamentaux de ce secteur. Nous souhaitons d’abord être capables de l’exercer pour nos propres véhicules, à savoir nos buy-back, les volumes de PSA Retail et ceux d’Aramis Auto. Quant à devenir un prestataire de service pour d’autres acteurs, il ne faut jamais se couper de potentiels développements mais ce n’est pas notre priorité, car nous avons déjà beaucoup à faire avec nos propres véhicules.

A LIRE. Occasion : le toujours plus du remarketing VO

Quels sont les retours des développements menés à l’international, notamment en Chine en février 2019 ?
Nous avons investi en Chine dans une activité d’intermédiation destinée à faciliter la reprise et la revente des VO par les professionnels ; une niche extrêmement petite. Nous sommes un peu moins petits dorénavant, et l’activité se développe conformément au plan de marche. En Inde, le partenariat mis en place avec CarDekho concerne l’estimation des véhicules et sera pleinement effectif au moment du déploiement commercial de Citroën dans le pays. Quand vous prenez position sur un nouveau marché et que vous créez un réseau, le sujet de la reprise des véhicules n’est pas forcément évident à maîtriser. Nous allons poursuivre le développement des jalons qui ont déjà été posés, que ce soit en Chine, en Inde ou au Brésil, avec Auto Avaliar. Il y aura dans les semaines ou les mois qui viennent des annonces de développement sur des marchés extérieurs à l’Europe.

L’objectif de réaliser en 2021 un tiers de vos ventes à l’étranger sera-t-il atteint ?
Nous étions à 2 % en 2015-2016, puis à 18 % en 2019. Nous continuons de progresser, et cet objectif est toujours atteignable.

Marc Lechantre, la bio express 

50 ans. Sciences Po Paris et ENA.

  • 1995-2005. Inspection générale des finances et direction du budget au ministère de l’Économie et des Finances.
  • 2006-2007. Groupe PSA. Responsable de fabrication à l’usine de Poissy, puis directeur du montage à Trnava (Slovaquie).
  • 2011. Directeur général de Peugeot Citroën Royaume-Uni et Irlande.
  • 2014. Directeur Strategy & Corporate planning.
  • 2016. Directeur de la business unit véhicules d’occasion.
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