Marché des lubrifiants. La vente d'huiles chute mais le prix augmente
habillage
banniere_haut

Marché des lubrifiants. La vente d'huiles chute mais le prix augmente

Le marché français du lubrifiant a, lui aussi, subi la crise sanitaire de plein fouet. Combiné à l'espacement des intervalles de vidange, les volumes continuent de baisser. Pour autant, le prix des huiles de synthèse permet de garder l'équilibre.

Par Ambre Delage
Publié le Mis à jour le

Pour coller aux nouveaux besoins du marché, Motul commercialise désormais une huile répondant aux caractéristiques des motorisations hybrides.

Comme la plupart des secteurs d’activités, le marché du lubrifiant a eu maille à partir avec la crise sanitaire de 2020. Moralité, d’après le Centre Professionnel des Lubrifiants (CPL), la tendance, de janvier à octobre 2020 serait de –12,4 % pour les véhicules particuliers, sachant que les lubrifiants « Essence et mixtes », qui pèsent près de 80 % du marché, sont, eux, à – 11,9 %. Pour ce qui concerne l’activité après-vente, les chiffres ne sont guère plus glorieux : – 10 % pour les concessionnaires, et entre – 15 et – 25 % pour le réseau secondaire, selon la zone d’implantation des points de vente…

« La crise sanitaire a donc eu un gros impact puisque le marché enregistre une baisse à 2 chiffres par rapport à 2019 – le marché du lubrifiant pour automobile était alors à – 6,3 % sur l’ensemble de l’année, ndlr –. Et même s’il y a eu un effet de rattrapage après le 1er confinement, il n’en reste pas moins que cela n’a pas suffi à combler les brèches. On attend forcément un rebond en 2021 mais pour retrouver des niveaux de 2019, il faudra sans doute attendre bien plus longtemps », estime Cédric Blanc, responsable marketing et communication de Motul France.

Désamour des automobilistes français pour la vidange

Abdellatif Dakkak, P-DG de LM France SAS.
Outre la crise sanitaire, le marché pâtit du désamour des automobilistes français pour la vidange. D’après le Gipa, 25 % d’entre eux déclarent reporter cette intervention en atelier, avant même la révision ou le changement de leurs pneumatiques. « Si nous comparons avec d’autres pays, en France, les automobilistes sous-estiment souvent l’importance que revêt le respect des espacements de vidange, intervient Abdellatif Dakkak, P-DG de LM France SAS. Car en fonction de l’utilisation que vous faites de votre auto, des bouchons, de votre lieu de circulation, etc., un compteur kilométrique affichant 30 000 km peut signifier que votre moteur, lui, a un taux d’usure équivalent à un moteur ayant parcouru 40 000 km !  »


Bref, mécaniquement, le volume de vente des huiles baisse. Une mécanique fortement accentuée par l’espacement des vidanges préconisées par les constructeurs. Avant les années 2000, les vidanges devaient s’effectuer tous les 10 à 15 000 km environ. Aujourd’hui, l’intervalle se situe davantage autour de 30 000 km ou tous les deux ans. Les volumes de vente sont donc en berne. « Certes, certains constructeurs préconisent des vidanges intermédiaires mais sur des véhicules qui roulent peu. Et puis cela concerne des véhicules spécifiques comme les dernières Twingo qui ont un moteur arrière, c’est donc très anecdotique. Ce n’est pas cela qui va révolutionner le marché ! Et puis c’est un non-sens : on espace les vidanges d’un côté, et de l’autre, on met des vidanges intermédiaires pour certains véhicules », s’interroge Cédric Blanc.

A LIRE. Développement familial durable chez Bardahl

Des huiles synthétiques plus onéreuses

Depuis plus de 10 ans, Liqui Moly diversifie ses activités en proposant des gammes de produits pour le maritime, la moto ou encore la maison.
En revanche, les chiffres d’affaires générés par la vente des huiles, eux, n’ont pas souffert de cet intervalle allongé entre deux vidanges. Tout simplement parce que les huiles de synthèse, symbolisées par les appellations 0W30, 5W30 et 5W40 ont désormais le monopole. Moins visqueuses, plus lubrifiantes et capables de protéger le moteur, quelles que soient les conditions d’utilisation, ces huiles ont mis au rebus les huiles minérales et huiles de semi-synthèse (10W40, 10W50, etc.). Autre particularité : être deux fois plus chères ! «  Il y a dix ans, une vidange était préconisée tous les 10 000 km, mais l’huile était à 50 euros. Aujourd’hui, c’est tous les 30 000 km, mais l’huile est quasiment deux fois plus chère. Donc si l’on a perdu en tonnage, on a gagné en chiffre d’affaires », explique Abdellatif Dakkak. Des huiles plus onéreuses, certes, et dont la perte de viscosité peut parfois poser question sur leur capacité à protéger correctement le moteur.

Une interrogation que balaie rapidement le P-DG de LM France SAS : « En réalité, la viscosité d’une huile en dit peu sur sa qualité. Ce sont les normes qui définissent ce critère. Mais si les constructeurs cherchent aujourd’hui des huiles moins visqueuses c’est à cause des contraintes environnementales et des recherches de réduction de consommation de carburant. Or, une huile moins visqueuse y contribue car elle permet aux composants du moteur, de plus en plus sensibles, de déployer moins d’énergie lorsqu’ils tournent ». Sans compter que ces huiles de synthèse s’accordent parfaitement aux éléments mécaniques des nouvelles motorisations. Des véhicules hybrides notamment. Raison pour laquelle Motul propose une gamme d’huiles de très faible viscosité, spécifique aux hybrides.
Une manière de coller à l’air du temps en limitant une éventuelle érosion du marché. Car, qui dit énergies alternatives, dit motorisations électriques et donc, fin des vidanges ! Et les acteurs du marché ont bien compris qu’il s’agissait de ne pas mettre tous leurs œufs dans le même panier.

A LIRE. Huiles pour anciennes : le retour aux sources

Demain un monde sans huile moteur ?

Cédric Blanc, responsable marketing et communication de Motul France.
Plutôt que de ne capitaliser que sur les lubrifiants, Motul et Liqui Moly, entre autres, se diversifient. « Nous vendons déjà autre chose que l’huile : liquide de frein, additifs… Et puis nous sommes partenaire du trophée Andros depuis plus de 20 ans et celui-ci est désormais 100 % électrique. Cela nous pousse à être pro-actif. Puisque nous ne pouvons pas proposer d’huiles sur ces véhicules, nous avons développé la marque Motul Car Care, des produits d’entretien automobile extérieur et intérieur. Donc même si notre cœur de métier reste le lubrifiant, nous développons d’autres lignes de produits depuis plusieurs années. Aussi nous pensons que l’énorme majorité du parc restera a minima hybride et ne sera jamais 100 % électrique », explique Cédric Blanc. Quant à Liqui Moly, ses activités ne tournent pas qu’autour de l’automobile : maritime, deux-roues, produits d’entretien pour la maison et le jardin font partie des quelque 4 000 références proposées par le fabricant. De quoi voir venir un éventuel changement de paradigme dans le milieu de la mécanique automobile.