Opel : « La marque est à un moment charnière de son histoire »
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Opel : « La marque est à un moment charnière de son histoire »

Igor Dumas a été nommé directeur général d'Opel France le 1er février 2021, dans un contexte tendu entre le constructeur et son réseau. Pour L'argus, il décrypte son plan de bataille destiné à transformer Opel en marque généraliste haut de gamme.

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Igor Dumas, directeur général d'Opel France, dans les locaux de L'argus à Paris

L'argus / Matthieu Méheust

Le 1er février 2021, Igor Dumas a accepté d’abandonner ses fonctions de directeur général de Peugeot Mexique et directeur de la zone Panamericana pour devenir le nouveau directeur général d’Opel France. Il en fallait du courage pour accepter la mission, son prédécesseur, Stéphane Le Guével, ayant été poussé vers la sortie moins de deux ans après son arrivée, sur fond de tensions entre le constructeur et son réseau.
Il faut dire qu’Opel perd des parts de marché depuis de nombreuses années, tandis que sa gamme s’est progressivement dégarnie après son rachat par PSA en 2017. Récemment, plusieurs distributeurs nous avaient confié leurs doutes sur la stratégie de la marque, remettant tout à la fois en cause la gamme, l’organisation, des objectifs de vente irréalisables, une trop faible rentabilité, ou encore le plan d’animation commerciale.

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Un retour de la confiance avec le réseau

Le plan « transform together » a été conçu conjointement par Opel et son réseau, alors que leurs relations s'étaient dégradées.

Six mois après son arrivée à la tête de la filiale française du constructeur allemand, Igor Dumas se souvient : « La situation avec le réseau était tendue parce qu’il y avait un manque de confiance. Et puis, il ne gagnait pas d’argent. » Or il considère fondamental que ce dernier soit rentable pour pouvoir « investir dans l’avenir, dans des équipes, dans des structures et dans la marque ». Le responsable pense toutefois avoir « franchi une étape » dans ses relations avec le réseau grâce à un retour de la confiance.
Sa première décision après sa prise de fonction a été de proposer aux concessionnaires et au groupement d’élaborer un plan stratégique ensemble, ce qu’il estime « assez novateur ». Ainsi, trois groupes de travail ont été mis sur pied, chacun étant constitué de dix personnes, « cinq d’Opel et cinq opérationnels issus du terrain : des chefs de vente, des chefs d’atelier, des responsables B2B, des directeurs de site et de groupe », détaille Igor Dumas. Qui précise avoir sollicité « les meilleurs du réseau. C’est même le groupement qui nous les a donnés ». Organisés autour des thèmes ventes/marketing, B2B/VU/VO et après-vente/qualité/formation, ces groupes de travail ont planché pendant quatre mois, entre mars et juin, « avec un seul objectif, une seule question : comment faire progresser Opel ? »,
rapporte le responsable.

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Un plan « transform together » élaboré conjointement

Dès son arrivée à la tête d'Opel France, Igor Dumas a initié un « plan de transformation à 360 degrés » destiné à donner une nouvelle place à Opel au sein du groupe Stellantis.

Le patron d’Opel France indique que tout le monde a réalisé « un boulot de titan », notamment lors de trois journées complètes émaillées de brainstormings, de diagnostics, de plans d’action et recommandations. Au final, cette grande réflexion a abouti à « des propositions très concrètes, opérationnelles et pragmatiques », qui ont été validées par la marque et le groupement. Baptisé « transform together », ce « plan de transformation contient 35 macro-actions qui se sous-divisent en actions très pratiques », explique Igor Dumas. Concrètement, il s’agit de démarches communes à réaliser par la marque et le réseau dans le but de monter en niveau d’exigence et d’exécution.
À l’issue d’une convention nationale, qui a permis de réunir tout le réseau en quatre sessions début juillet à Reims, au Mans, à Bordeaux et à Lyon, Igor Dumas assure que les concessionnaires lui ont fait « des retours extrêmement positifs », y compris le président du groupement, Michel Maggi. « Ils ont apprécié le ton, la dynamique et le côté opérationnel, affirme le patron de la marque. Ce qui est bien avec les concessionnaires, c’est qu’on peut tout leur dire. Il faut juste être sincère, ne pas leur cacher la vérité et surtout respecter ses engagements. » Or, même si le réseau a gagné de l’argent en juin et réduit ses pertes à la fin du premier semestre, notre interlocuteur reste lucide et lance : « On a fait 5 % du boulot en réalisant ce plan, les 95 % restants consistent à l’exécuter. »

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Une stratégie à 360 degrés

Alors que la production de l'Opel Astra a été divisée par six en l'espace de quinze ans, le constructeur allemand mis sur cette sixième génération pour booster les ventes.

Mais ces relations apaisées ne constituent qu’une partie du « plan de transformation à 360 degrés » destiné à donner une nouvelle place à Opel au sein du groupe Stellantis, qui compte quatorze marques. Lors de la convention organisée début juillet, le directeur général a également présenté à ses distributeurs le plan produit jusqu’en 2023, ainsi que la stratégie du consortium issu de la fusion de PSA et FCA pour la firme à l’éclair. Le responsable résume : « Axée autour de quatre piliers – la marque, les produits, le réseau et les clients –, cette stratégie vise à faire d’Opel une marque généraliste haut de gamme allemande, enthousiasmante et proche des gens. » Alors que le constructeur se retrouve positionné sur le même créneau que Peugeot au sein du groupe, mais à un niveau d’avancement moindre, Igor Dumas estime que « la marque est à un moment charnière de son histoire. La montée en puissance qui se confirme à chacun de nos lancements ne va faire que s’accélérer ».
Après la Corsa, considérée comme la première étape de ce changement, le directeur général affirme que « le Mokka est l’incarnation du nouvel Opel ». Cela va continuer avec d’autres nouveautés prévues d’ici à début 2022, notamment le Grandland et l’Astra. « On va terminer l’année 2021 avec un âge moyen de la gamme de 2 ans, ce qui est très jeune », ajoute-t-il, sachant que l’électrification des modèles va s’intensifier pour préparer la conversion au 100 % électrique en Europe, prévue à l’horizon 2028. Mais, conscient du travail à faire pour changer l’image de la marque auprès des clients, le patron estime que « cette transformation est un challenge. On ne vendra plus d’Opel à 10 000 euros, c’est fini ».

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Regagner des parts de marché progressivement

Selon Igor Dumas, « le Mokka est l'incarnation du nouvel Opel ».

Sur le plan commercial, cette ambition doit aboutir à « plus de ventes et de clients contents ». Un pari d’envergure quand on sait qu’Opel a perdu sans cesse des parts de marché en France ces derniers temps, pour tomber sous la barre des 3 %, alors que durant des années la cible était fixée à 5 %. Toutefois, Igor Dumas se garde bien de dévoiler des objectifs chiffrés. Il indique seulement vouloir « progresser mois après mois, trimestre après trimestre », tout en privilégiant les ventes à particuliers et le B2B. Il vise également pour sa gamme de VUL remodelée et électrifiée une part de marché supérieure à celle des voitures particulières, sans là encore donner de chiffre précis. Après avoir « rompu avec cette spirale négative », il souhaite « aller vers l’avant avec une gamme transformée », tout en restant lucide. « Une montée en gamme ne se fait pas en claquant des doigts, dit-il, le consommateur ne voit pas Opel à cette place. » L’enjeu consiste donc à fidéliser les clients et à en conquérir de nouveaux, « ce qui ne va pas être simple car ce ne sont pas forcément les mêmes », admet notre interlocuteur.
Le patron affirme toutefois que son « arme commerciale » pour relever le défi de la montée en gamme sera la LOA, alors qu’Opel est moins avancé que d’autres concurrents sur le sujet. Il compte travailler sur des offres attractives, notamment permises par une progression des valeurs résiduelles grâce à la meilleure qualité des voitures, afin de compenser la hausse des prix. Alors qu’Opel Bank a été créée il y a seulement trois ans pour remplacer un prestataire externe, la LOA ne représentait que 25 % des ventes. Or elle est déjà montée à 35 %. Mais Igor Dumas souhaite « converger le plus vite possible vers la moyenne du marché, à 60 % ».

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Un long déclin des ventes

Ces dernières années, les différents dirigeants de la firme à l’éclair visaient 5 % de part de marché en France, soit un score qui n’a plus jamais été atteint depuis 2006, quand Opel était la cinquième marque du territoire national avec 99 256 voitures vendues. En quinze ans, les volumes et la part de marché du constructeur allemand dans l’Hexagone ont été divisés par deux pour atteindre 43 801 unités en 2020, soit la 11e place du marché avec 2,7 %.
Mais le déclin de la marque Opel est plus ancien et s’inscrit dans un long cycle de vingt-cinq ans. Depuis la part de marché record de 7,3 % enregistrée en 1996 grâce à 154 658 unités écoulées, elle n’a eu de cesse de diminuer au profit d’autres acteurs comme Dacia, Toyota, BMW, Audi, Kia ou encore Hyundai, dont les ventes et la part de marché ont fortement progressé sur la même période.

 

Le déclin d'Opel s'inscrit dans un long cycle de 25 ans. Dans le même temps, d'autres acteurs comme Dacia, Toyota, BMW, Audi, Kia ou Hyundai en ont profité pour gagner des parts de marché.

Instabilité récurrente à la tête d’Opel

Uwe hochgeschurtz a été nommé directeur général d'Opel le 1er septembre 2021.

À partir du 1er septembre 2021, le nouveau directeur général d’Opel est Uwe Hochgeschurtz, ancien DG de Renault pour l’Allemagne, l’Autriche et la Suisse, qui a débuté sa carrière chez Ford en 1990. Il est directement rattaché à Carlos Tavares au sein de la « top executive team » du groupe automobile issu de la fusion entre PSA et Fiat Chrysler. Uwe Hochgeschurtz remplace Michael Lohscheller, qui occupait ce poste depuis juin 2017 consécutivement à la démission surprise de Karl-Thomas Neumann, à l’époque où PSA était en train de racheter le constructeur allemand en difficulté.
La valse des patrons à la tête d’Opel est à l’image du parcours difficile de la marque depuis une vingtaine d’années. Après la démission de Carl-Peter Forster en 2009 pour cause de divergence de points de vue avec l’ancienne maison mère General Motors, Opel a connu quatre patrons en un peu plus d’une décennie : Nick Reilly (2009-2011), Karl-Friedrich Stracke (2011-2012, parti sur démission), Karl-Thomas Neumann (2013-2017, parti sur démission) et enfin Michael Lohscheller (2017-2021). Malgré ce nouveau départ pouvant être interprété comme un désaveu alors qu’Opel reste en difficulté, Carlos Tavares « remercie chaleureusement » Michael Lohscheller d’avoir « établi avec les employés des bases solides et durables ». Le patron de Stellantis estime que « ce redressement ouvre la voie au prochain développement commercial mondial de la marque » et qu’Uwe Hochgeschurtz « saura mener à bien ce nouveau chapitre d’Opel grâce à sa grande expérience automobile de plus de trente ans ».


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La délicate question de la réorganisation des réseaux

Alors qu'Opel va « terminer l'année 2021 avec un âge moyen de la gamme de 2 ans », l'électrification des modèles va s'intensifier pour préparer la conversion au 100 % électrique en Europe, prévue à l'horizon 2028.

En juin, Stellantis a résilié les contrats de vente et de distribution de services de toutes ses marques en Europe, avec un préavis de deux ans, pour réorganiser ses réseaux. Selon Igor Dumas, cette décision se destine à obtenir « un réseau efficace, qui contribue à améliorer la qualité de service et la satisfaction des clients ». Si l’annonce des détails est prévue pour plus tard dans l’année, il indique avoir déjà apporté des précisions « rassurantes pour le réseau ». Le responsable affirme qu’il n’est « pas question de confier toutes les marques de Stellantis à un même acteur dans une ville donnée », ni de favoriser uniquement les gros concessionnaires, notamment lorsqu’un local hero se révèle performant dans sa zone.
Seuls deux critères seront ainsi pris en compte certifie Igor Dumas : « la part de marché du concessionnaire et la satisfaction client ». Le directeur général d’Opel France indique que « sur la base de ces critères on est en train de définir les acteurs, majoritaires, avec qui l’aventure va continuer », le tout « sans aucun dogme ». Avec 142 points de vente exploités par 87 investisseurs, il ajoute que «  le réseau est peu concentré par rapport à d’autres marques comme Peugeot ou Citroën ». Mais le dirigeant précise que « la concentration n’est pas un but en soi. Ce que l’on souhaite, c’est avoir les meilleurs acteurs et que la marque Opel ait un poids suffisant chez eux pour qu’ils se mobilisent dessus ».S’il admet qu’il « peut y avoir un peu de concentration », Igor Dumas assure que ce n’est pas l’objectif. L’idée consiste plutôt à « donner davantage de territoire Opel à nos concessionnaires les plus performants ».


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