Pour ses 18 ans, Aramis Auto revient sur les débuts de l'aventure
A force de persévérance et de bon sens, la société Aramis Auto, qui a célébré ses 18 ans en septembre 2019, est devenue l'un des plus gros distributeurs indépendants en France, au point de susciter en 2016 l'intérêt du groupe PSA.
Nicolas Chartier et Guillaume Paoli ont fondé la société Aramis Auto en septembre 2001
Le 21 septembre 2019, Guillaume Paoli, cofondateur d’Aramis Auto, postait un long message sur LinkedIn pour rappeler la naissance de la société dix-huit ans plus tôt. Ce 21 septembre 2001, quand il immatricule la société, le dirigeant a 29 ans ; son compère Nicolas Chartier en a 28. Les deux hommes ont fait connaissance en 2000 dans une start-up d’import-export d’objets promotionnels, que Guillaume Paoli vient de rejoindre après trois années chez Unilever. Les deux anciens étudiants en école de commerce s’y ennuient et nourrissent vite l’envie de se lancer dans l’entrepreneuriat.
Avec des moyens limités (20 000 € chacun), ils se mettent en quête d’un secteur d’activité important, dans lequel ils envisagent d’apporter « quelque chose de nouveau ». « J’aimais aussi l’idée de toucher le grand public, précise Guillaume Paoli. En 2001, nous avions identifié deux secteurs de la distribution qui, pour caricaturer, n’avaient pas bougé depuis la Seconde Guerre mondiale : l’auto et la pharmacie. Nous observions un système conçu pour le constructeur, pas tellement pour le consommateur, qui cherchait des prix compétitifs et une bonne expérience client. Et tout ça n’était pas réuni. »
Un contexte favorable pour Aramis Auto

En pleine « bulle » Internet, le contexte se révèle opportun pour poser les bases d’un nouveau modèle. « Nous percevions que le Web allait avoir un impact sur la distribution automobile, même si on ne savait pas encore lequel. » En analysant plus en profondeur le secteur, ils découvrent qu’il est possible de vendre en mandat des VN en provenance de l’UE. La fiscalité plus importante dans certains pays, la surproduction structurelle de l’automobile, de même que les écarts de performance des marques selon les marchés, sont autant de facteurs favorables les convainquant de persévérer. « Nous sommes arrivés après les pionniers, admet Guillaume Paoli. Nous avons regardé ce que des mandataires, comme Auto IES, faisaient à l’époque. Il existait aussi des tentatives de vente de voitures 100 % en ligne, type Degrifcars, certainement prématurées, qui nous ont persuadés que créer des points de vente légers et différents de ceux des constructeurs avait de la valeur. Nous avons opté pour un modèle économique où le digital et le physique étaient intrinsèquement liés. »

Studio dans le 15e arrondissement
Le premier point de vente est un studio, celui de Nicolas Chartier, où les deux dirigeants se confrontent aux aléas du commerce automobile. « Au début, nous ne savions pas comment vendre les voitures. Ensuite, nous avons constaté que l’on ne savait pas bien les acheter. Cela a fini par fonctionner quand nous avons commencé à faire de la publicité dans la presse automobile grand public… » La première voiture est commercialisée le 1er janvier 2002. « Une Peugeot 206 vendue à Mme Paunet », se souvient Guillaume Paoli. Le modèle est simple : proposer des prix plus attractifs que ceux des concessionnaires, en réduisant les frais et les marges. Les deux hommes, qui ne se versent pas de salaire, préparent les véhicules et s’occupent de l’immatriculation. « Ce n’était clairement pas le travail pour lequel nous avions été formés », sourit Guillaume Paoli.
Maille à partir avec certains constructeurs automobile

Un labeur vite récompensé. En 2002, Aramis Auto vend 240 voitures, volume qui grimpe à 673 l’année suivante. « Nous nous étions fixé plusieurs caps à franchir et avions un objectif de 10 000 voitures commercialisées en 2010. Et nous l’avons atteint en 2009. » Fin 2002, la société recrute un apprenti et une stagiaire. Elle installe ses bureaux rue Lecourbe à Paris (fermés depuis) et ouvre dès 2003 un point de vente à Lyon, dans un garage AD. « Une semaine sur deux, l’un de nous y descendait pendant trois jours. Le fait d’avoir un réseau rassurait un peu les clients, qui, objectivement, étaient des aventuriers... Il fallait être un peu fou pour acheter une voiture à une société qui avait 5 000 € de capital social ! » Les entrepreneurs rassurent les banques, mais agacent un peu les constructeurs. « Le statut de mandataire étant encadré par la Commission européenne, nous étions inattaquables. Nous avons eu maille à partir avec certains constructeurs, mais ça n’est jamais allé très loin, car nous n’avons jamais représenté un risque existentiel pour la distribution automobile. »
Aramis s’installe à Aix-en-Provence en 2004, puis à Bordeaux et à Rennes en 2005, optant, dès le départ, pour un déploiement en propre, jugé plus intéressant au plan économique. La société s’étend, se fait un nom, son approche multimarque séduit les acheteurs, de même que le parti pris de proposer des prix fixes, sans négociation possible. Certains choix se révèlent au contraire infructueux. « Nous avons connu plus d’échecs que de réussites, reconnaît Guillaume Paoli. Au début, nous ne faisions pas de reprises, nous perdions donc des ventes. Le financement, qui ne figurait pas dans l’ADN de la société, a été compliqué à mettre en place. Nous avons lancé en 2005 une vitrine digitale, sous la marque Monospace Center, que nous avons arrêtée deux ans plus tard, faute de temps, d’énergie et d’argent pour tout mener de front. »
Expérience avortée en Allemagne

A la fin des années 2000, Aramis Auto amorce un virage sur l’occasion, au potentiel de croissance plus important, tout en posant les jalons de son développement en Allemagne, après une première levée de fonds. « Nous avons commis l’erreur de nous lancer simultanément sur le VO et en Allemagne. Nous sommes partis trop tôt à l’international et, surtout, pas comme il le fallait. Nous nous sommes dispersés et aucun des projets n’a fonctionné. »Les dirigeants abandonnent l’Allemagne en 2014 pour se concentrer sur le VO. Un choix payant, mais qui apporte de nouveaux problèmes. « Nous n’avions pas compris que le reconditionnement se situait au cœur de la création de valeur du VO. Or, pour garantir la qualité des véhicules et des prix compétitifs, la seule solution était d’industrialiser. »
International et PSA
En 2014, ils ouvrent leur première usine de reconditionnement, à Donzère (Drôme). Les volumes décollent et l’occasion devient la principale activité. Deux ans plus tard, les associés tentent à nouveau le pari de l’international, optant pour une nouvelle levée de fonds. « PSA a eu vent de notre approche. Au début, nous étions plutôt réticents, car nous n’avions simplement pas imaginé un rapprochement avec un constructeur. Nous avons indiqué que nous souhaitions rester indépendants. De son côté, PSA voulait prendre une participation majoritaire. »L’affaire est conclue fin 2016. Dans la foulée, la société s’étend en Espagne et en Belgique. « Nous sommes globalement satisfaits. Nous restons autonomes, tout en profitant de synergies que nous n’aurions pas pu mettre en œuvre avec un fonds d’investissement. » A la fin de son message sur LinkedIn, Guillaume Paoli soutient qu’il « reste beaucoup à inventer » vu les mutations à venir dans l’automobile. Suffisamment pour entreprendre une nouvelle aventure ?