Quand les enseignes de centre-auto françaises s'internationalisent
Pour lancer leur marque hors des frontières françaises, les réseaux de réparation rapide automobile ont structuré leur processus d'implantation avec soin et à travers différents modes opératoires.
Point S a de nombreuse implantations dans le monde, comme en Asie ou aux Etats-Unis.
JosephGow
La France est le leader incontesté de la franchise, avec 1 980 réseaux (74 100 points de vente), dont environ 38 % sont implantés à l’étranger, selon la Fédération française de la franchise. Comme l’illustre notre carte des implantations, le secteur automobile français et plus particulièrement les enseignes spécialistes de la réparation rapide et de l’entretien courant sont partout dans le monde. Quand la stratégie d’une enseigne est pertinente dans l’Hexagone, pourquoi ne le serait-elle pas au-delà des frontières françaises et européennes…?
L’international convainc car il est un puissant levier de croissance et plusieurs options restent possibles pour répondre à cette envie de diversification : ouvrir des succursales, créer des joint-ventures ou confier cette mission à un franchisé ou master franchisé*. Nous allons analyser ici les stratégies développées par certaines enseignes françaises, leur processus d’implantation et leurs ambitions. Le voyage peut être long, coûteux, décevant ou, au contraire, efficace et rentable.
Une force de frappe

Les huit acteurs contactés revendiquent à eux tous plus de 13 160 ateliers de réparation à travers le monde. Une force de frappe qu’ils n’hésitent pas mettre en avant. « Nous sommes une enseigne internationale, indique d’emblée Denis Séguier, directeur international de Midas, présent dans 10 pays. La reconnaissance de notre marque est très importante, car nos clients, grands comptes ou particuliers, voyagent beaucoup. Alors plus nous sommes visibles, mieux c’est pour tout le monde. Nous sommes sûrs, au moins, d’apporter une solution pour tous nos clients et de combler leur satisfaction. » Euro Repar Car Service, l’enseigne multimarque aux 4 000 garages dans le monde, part du même principe : répondre aux besoins de tous les clients. Outre la notoriété, c’est surtout la fidélité qu’elle veut développer. Pour Joël Arandel, directeur marketing de Point S (34 pays), l’implantation ne se fait pas juste pour assouvir des désirs de grandeur :
« Nous ne plantons pas simplement un drapeau, ce n’est pas qu’un effet d’annonce. Nous véhiculons une force qui est notre indépendance. Mais si nous cherchons à nous installer dans un pays, c’est pour y prétendre à 5 % de part de marché minimum. En dessous, nous n’y allons pas. »
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La réduction des prix est un des enjeux stratégiques du développement international de ces enseignes, plus fortes auprès des équipementiers et manufacturiers dans la négociation des conditions d’achat. « Nous faisons logiquement plus de volumes de pièces et d’équipements. Nous disons à nos fournisseurs que nous couvrons seuls plusieurs territoires. Nous leur parlons toujours de représentation, de développement, de compétitivité au moment de négocier », ajoute Joël Arandel (Point S). La création de garages Euro Repar Car Service à l’étranger repose sur le soutien des importateurs des marques de PSA, qui dénichent les meilleurs partenaires ou les plus pertinentes situations géographiques, et sur une présence accrue lors des salons professionnels internationaux (une quinzaine en 2018). Pour les autres enseignes, les approches sont variables.
Opportunité ou candidature spontanée

Elles fonctionnent souvent par opportunité de rachat ou par candidature spontanée.
Midas et Point S ont cependant créé une structure consacrée au développement européen et international, où des dossiers sont à traiter en priorité. « Nous nous sommes fixé des cibles prioritaires et nos axes de travail reposent sur l’économie et la culture du pays, indique Denis Séguier (Midas). La liste A rassemble les pays les plus compatibles avec notre modèle. Pour la liste B, nous sommes en veille ou en phase d’étude. La liste C se compose de zones à développer uniquement par opportunité. » Point S se fixe à peu près les mêmes règles en termes de priorité, soit par sollicitation, soit par ciblage.
Quoi qu’il en soit, avant d’expatrier sa marque hors des frontières, certaines étapes sont scrupuleusement respectées par tous les acteurs : étude de marché bien sûr (parc, concurrence, partenaires locaux, tendance dans les ateliers, rentabilité...) et suivi du cahier des charges signé par les entrepreneurs franchisés. Forcément, des éléments contractuels assurant la cohérence entre les plaques géographiques, leurs points de vente et ce qui est fait en France sont clairement établis.
« La passerelle avec la France existe et elle reste nécessaire, car nous sommes tous formés ici. Et nous devons véhiculer notre savoir-faire et nos outils partout où nous sommes », précise le dirigeant de Midas.
« Nous confions une carte à une famille ou à un groupement, avec un plan bien établi, explique Joël Arandel (Point S). Nous venons d’arriver en Italie avec Professional Pneus pour partenaire. Ces vendeurs utilisent notre marque, alors autant les cadrer sur nos objectifs, soit 530 points de vente avec eux. »
La master franchise est adaptée

Point S et Midas ont décidé de se développer en master franchise. Selon l’Observatoire de la franchise, l’avantage de cette solution est qu’elle permet de tester un marché étranger. En effet, en collaborant avec un entrepreneur local connaissant les spécificités du pays choisi, le franchiseur adapte son concept au marché local. Si, en amont, de nombreux repérages de terrain et rencontres ont été nécessaires avant l’ouverture d’un centre franchisé à l’étranger, les marques tiennent à suivre l’évolution de leurs collaborateurs et à les accompagner sur toutes les spécificités des métiers de réparateur, de commerçant et de chef d’entreprise. « Nous sommes exigeants sur l’image. Il faut par conséquent qu’ils aient les mêmes repères que nous, comme pour la révision constructeur, par exemple, insiste Joël Arandel (Point S). Mais l’internationalisation nous impose aussi de nous adapter aux tendances et réglementations locales. » « Aucun cursus n’est linéaire, tout doit se construire. Le sujet est passionnant ! s’enthousiasme Denis Séguier (Midas). Mille configurations sont possibles pour se développer à l’étranger, c’est pour ça que nous sommes très ambitieux : conquérir vingt pays majeurs dans cinq ou six ans. Et nous avons les ressources nécessaires pour y parvenir. » Les ambitions de Point S sont également fortes. Sur un plan de trois ans, l’enseigne veut atteindre 3 000 points de vente en Europe et 1 000 en Amérique du Nord.« Les nombreuses opportunités que nous recensons sont un plus pour notre stratégie. Ce potentiel nous pousse à voir toujours plus grand », souligne Joël Arandel (Point S). Aucune limite non plus n’est fixée du côté d’Euro Repar Car Service, qui prévoit que sa présence s’étendra à 50 pays, avec plus de 10 000 garages dans le monde, « le plus vite possible ».